Dans le bras de fer entre l’Algérie et la France depuis que cette dernière a reconnu en juillet dernier la souveraineté marocaine au Sahara occidental, le pouvoir à Alger utilise les Algériens en situation irrégulière sous OQTF (Obligation de quitter le territoire français) comme moyen de pression sur Paris.

Dernier fait en date : la compagnie aérienne nationale Air Algérie impose désormais un laissez-passer consulaire pour l’embarquement des Algériens en situation irrégulière sous OQTF, y compris lorsqu’ils disposent d’un document d’identité valide, rapporte le site du Journal du Dimanche (JDD). Lors de l’exécution de l’éloignement par voie aérienne de ressortissants algériens à partir d’un aéroport français, « Air Algérie exige désormais des laissez-passer consulaires » (LPC), même lorsque ces individus sont détenteurs de pièces d’identité en cours de validité.

Une décision qui va à l’encontre des accords franco-algériens en vigueur, lesquels stipulent que la simple présentation d’un document d’identité valide suffit à l’expulsion. «Cette exigence supplémentaire et nouvelle déroge aux accords franco-algériens, le document d’identité en cours de validité permettant à lui seul de réaliser des éloignements», selon une note interne envoyée à la police nationale par le cabinet du ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, dont le JDD a obtenu une copie. 

En cas de refus d’embarquement d’un Algérien expulsé, une attestation devra être «systématiquement» demandée par les forces de l’ordre au chef d’escale d’Air Algérie, peut-on lire dans la note interne. Et «en cas de refus de délivrance d’un écrit, l’identité du chef d’escale devra être relevée». Et encore ? Comment peut réagir concrètement la France ? Pour exemple, comme le suggère certains commentateurs politiques, Paris pourrait très faire pression sur Alger en retirant des créneaux de vols à Air Algérie voire de l’interdire dans le ciel de France ! Bien entendu, comme mesure de réciprocité, Air France et Transavia seraient interdite en Algérie. Mais sans liaison aérienne, Alger aurait à affronter à la fois le mécontentement de sa diaspora qui ne pourrait plus rentrer au pays et celui des Algériens qui ne pourraient plus venir se faire soigner en France. 

Dans les faits, même si Air Algérie acceptent d’embarquer des Algériens sous OQTF, rien ne garantit qu’ils soient acceptés à leur arrivée en Algérie. En janvier, le médiatique influenceur algérien surnommé Doualemn a été refoulé à l’aéroport d’Alger, obligeant les policiers français qui l’accompagnaient de le ramener en France. Plus récemment, selon Le Parisien, les autorités algériennes ont refusé un Algérien -condamné pour pour plusieurs faits dont vol, recel et port d’arme blanche- à l’aéroport d’Oran dans la nuit du 10 au 11 février, malgré sa carte d’identité algérienne valide, sous prétexte qu’il n’avait pas de LPC.

Dans un rapport publié en janvier 2024, la Cour des comptes a estimé que la France doit « mieux s’organiser » pour parvenir à expulser plus efficacement les étrangers sous le coup d’une OQTF, dont un sur dix est effectivement éloigné. Les autorités ne parviennent à expulser qu’une « seule une petite minorité -autour de 10 %- » des étrangers visés par une OQTF, écrivent les auteurs du rapport, en détaillant une politique de lutte contre l’immigration irrégulière globalement « déficiente » au regard des « moyens importants qui lui sont alloués » (1,8 milliard d’euros annuel).

Refus des Algériens sous OQTF sans laissez-passer consulaire : si Air Algérie était interdite dans le ciel de France ? 1 Air Journal

@AJ