Un juge fédéral du Texas a rejeté un accord de plaider coupable de Boeing relatif à une accusation de complot de fraude criminelle liée à une enquête du ministère de la Justice sur deux accidents mortels d’avions 737 MAX.

Boeing a accepté le 7 juillet dernier de plaider coupable de complot visant à frauder la Federal Aviation Administration (FAA) après que le gouvernement a déclaré que l’avionneur avait sciemment fait de fausses déclarations sur les logiciels clés (MCAS) du 737 MAX. En vertu de cet accord, le constructeur aéronautique a été condamné à une amende de 243,6 millions de dollars. Un contrôleur de conformité indépendant devait également être nommé pour superviser la conformité chez Boeing au cours d’une période probatoire de trois ans. Boeing devrait également investir au moins 455 millions de dollars dans des programmes de conformité et de sécurité.

L’accord devait mettre un terme aux poursuites pénales et à un retentissant procès public. Les familles des 346 personnes tuées dans deux crashs de Boeing 737 MAX en 2018 et 2019 ont depuis pu déposer leurs objections auprès du juge Reed O’Connor, qui vient finalement de rejeter l’accord.

Le tribunal s’est inquiété de la capacité du gouvernement à engager un contrôleur indépendant – après appel à candidatures et consultation de Boeing, mais sans implication du tribunal – et à assurer le respect de l’accord. Le juge Reed O’Connor a notamment critiqué le mode de désignation d’un superviseur indépendant qui, selon lui, « marginalise à tort » le rôle du tribunal. L’ordonnance stipule également que l’utilisation de l’accord par Boeing et le gouvernement porte directement atteinte aux efforts d’éthique et de lutte contre la fraude et va à l’encontre de l’intérêt public. D’autant que si Boeing aurait été obligé de conserver le contrôleur de conformité sous peine de violation de sa probation, il ne l’obligeait cependant pas à se conformer aux recommandations anti-fraude formulées.

Le magistrat aux décisions généralement conservatrices, plébiscité par les républicains de Donald Trump et leurs proches, a ordonné aux deux parties de revenir vers lui dans les trente jours avec un nouveau projet. Le tribunal a déclaré qu’il devait jouer un rôle plus important dans les rapports du contrôleur et a cité les inquiétudes des victimes selon lesquelles une violation de la DPA s’est produite sur un vol d’Alaska Airlines lorsqu’une porte est tombée d’un 737 MAX. O’Connor a déclaré que si Boeing avait violé l’accord, alors « la tentative du gouvernement de garantir le respect a échoué ».

Le vol d’Alaska Airlines s’est produit deux jours seulement avant l’expiration de l’accord de poursuite différée du 7 janvier 2021, qui avait protégé Boeing des poursuites pour les accidents mortels en Indonésie et en Éthiopie, entraînant cette accusation de complot de fraude criminelle. « Le rejet catégorique de l’accord de plaider-coupable constitue une importante victoire pour les familles », a immédiatement réagi Paul Cassell, avocat de familles dans ce volet pénal, dans un communiqué. « Les procureurs fédéraux et les avocats de la défense de haut rang ne peuvent plus conclure des accords en coulisses et s’attendre à ce que les juges les approuvent. Les victimes peuvent s’y opposer – et lorsqu’elles ont de bonnes raisons de plaider, les juges y répondront. » Selon lui, ce rejet devrait provoquer « une renégociation importante » de cet accord « pour tenir compte des 346 décès causés criminellement par Boeing et mettre en place une surveillance appropriée de Boeing pour garantir qu’il ne commettra plus jamais un crime comme celui-ci à l’avenir. »

Catherine Berthet, de France, qui a perdu sa fille Camille Geoffroy, a réagi: « En tant que mère en deuil, je suis tellement soulagée par la décision du juge O’Connor de rejeter l’accord de plaidoyer honteux négocié par deux parties, Boeing et le DOJ, qui travaillent ensemble sans aucune considération pour les victimes du crime le plus meurtrier de l’histoire américaine récente. Je suis reconnaissante au juge O’Connor d’avoir ouvert les yeux et les oreilles sur ces victimes que Boeing et le DOJ continuent de rejeter et d’ignorer – gifles après gifles. Néanmoins, je sais que nous devrons examiner attentivement le libellé de cette décision et rester vigilants pour que Boeing soit totalement tenu responsable de ce crime. Je suis convaincue que justice sera rendue et qu’il n’y a qu’une seule façon d’y parvenir : un procès équitable. »

Crash des Boeing MAX : un juge rejette l'accord de plaider coupable avec le gouvernement 1 Air Journal

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