L’Union européenne va établir une liste noire des compagnies aériennes complices de l’acheminement de migrants par la Biélorussie jusqu’aux frontières européennes, et interdire la location d’avions européens à la compagnie nationale basée à Minsk, Belavia.
Dans le cadre de la « réaction unie à l’instrumentalisation étatique d’êtres humains à la frontière extérieure de l’UE avec la Biélorussie », la Commission et le haut représentant ont proposé le 23 novembre 2021 des mesures visant à « prévenir et restreindre les activités des opérateurs de transport qui pratiquent ou facilitent le trafic de migrants ou la traite des êtres humains à destination de l’UE ». Il s’agit d’un nouvel instrument qui viendra s’ajouter à la panoplie dont l’UE dispose pour soutenir les États membres touchés par des attaques hybrides de ce type. Les récents événements à la frontière entre l’Union et la Biélorussie « n’auraient pas pu se produire sans que certains opérateurs de transport n’aient contribué, sciemment ou non, à l’exploitation de personnes, pratique qui a causé d’énormes ravages sur le plan humanitaire et induit un coût élevé pour la sécurité aux frontières extérieures de l’UE et pour la stabilité de la région », souligne le communiqué des instances européennes.
Afin que l’UE dispose des « outils appropriés » pour combattre l’instrumentalisation d’êtres humains à des fins politiques, la Commission propose un nouveau cadre juridique qui permettra à l’Union d’adopter des mesures ciblées contre les opérateurs de transport, quel que soit le mode de transport (terrestre, aérien, fluvial et maritime), qui « pratiquent ou facilitent » le trafic de migrants ou la traite des êtres humains à destination de l’Union européenne. Ces mesures seraient proportionnées et déterminées au cas par cas ; elles pourraient comprendre la limitation des opérations sur le marché de l’Union, la suspension des licences ou autorisations, la suspension des droits de se ravitailler en carburant ou de procéder à un entretien au sein de l’UE, et l’interdiction de transiter par le territoire de l’UE ou de le survoler, d’effectuer des escales techniques ou de faire escale dans les ports de l’UE.
Le président du Conseil européen Charles Michel a annoncé devant le Parlement européen réuni à Strasbourg qu’une décision « imminente » va être prise pour faire cesser la location d’avions par des sociétés de leasing de l’UE à ces compagnies, en particulier à Belavia dont « la majorité de la flotte est constituée par des avions loués à des entreprises de l’UE. Une décision va être prise pour faire cesser cela ». La compagnie nationale dispose actuellement de 28 monocouloirs Boeing et Embraer, dont vingt loués.
Depuis le début de la crise avec la Biélorussie (déclenchée par le détournement en mai dernier du vol FR4978 de Ryanair afin d’arrêter l’opposant Roman Protasevich), l’engagement de l’UE a permis d’obtenir « des résultats ». Plusieurs pays d’origine et de transit ont suspendu les vols à destination de la Biélorussie et ont renforcé l’inspection et le filtrage des passagers dans les aéroports. Il y a dix jours, Belavia et Turkish Airlines ont annoncé qu’elles refusaient désormais d’embarquer en Turquie des passagers d’Irak, de Syrie ou du Yemen à destination de Minsk (hors passeports diplomatiques) ; et à Damas, Cham Wings Airlines a annoncé la suspension de ses opérations vers la Biélorussie.
Nombre des personnes exploitées dans cette crise par le régime biélorusse sont de nationalité iraquienne, rappelle l’UE qui dit mener « une coopération intense » avec l’Iraq : les vols directs au départ de l’aéroport de Bagdad et à destination de la Biélorussie ont été suspendus au mois d’août, à la suite de quoi les vols entre Erbil et la Biélorussie transitant par des pays tiers ont également été interrompus. L’Iraq organise des vols de rapatriement pour ses ressortissants, avec le soutien de l’UE, tandis qu’une assistance financière supplémentaire « à la réintégration en Iraq doit encore être apportée ».
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a déclaré à cette occasion : « Les tentatives visant à déstabiliser l’UE en instrumentalisant des êtres humains ne fonctionneront pas. L’Union est unie et prend diverses mesures pour résoudre la situation qui sévit à ses frontières extérieures avec la Biélorussie. Nous présentons ce jour une nouvelle proposition visant à mettre sur liste noire les opérateurs de transport impliqués dans le trafic de migrants ou la traite des êtres humains à destination de l’UE, comme je l’ai annoncé pour la première fois il y a deux semaines. Jamais nous n’accepterons que des êtres humains soient exploités à des fins politiques ».
La commissaire aux transports, Adina Vălean, a ajouté : « La coopération étroite et immédiate dont nous avons été témoin, ces dernières semaines, de la part de la communauté aéronautique mondiale (dont l’EASA NDLR) montre qu’il est essentiel d’associer étroitement les opérateurs de transport à la prévention de cette nouvelle forme de menace hybride et à la lutte contre cette dernière. Notre nouvelle proposition de mesures visant à cibler les opérateurs de transport qui facilitent ou pratiquent le trafic de migrants nous dotera d’un outil puissant pour agir lorsque des opérateurs chercheront à tirer profit de l’exploitation d’êtres humains ».
Anna Stazzi a commenté :
24 novembre 2021 - 13 h 49 min
Oouh ! Les gros yeux !
Ces décisions microscopiques feront sans doute aussi peur à Lukashenko que la grosse colère de l’UE après le détournement pour l’arrestation d’un opposant du fameux vol Ryanair.
Pas d’inquiétude, les Bélarusses loueront leurs zincs chez le premier voisin venu.
THY, FlyDubai sont-elles également concernées? Pourtant, elles dépendent aussi d’états dictatoriaux..et font le même job que Belavia en transportant leurs proies en toute connaissance de cause.
Enfin, concernant « l’instrumentalisation des humains », la même et très humble Commission Européenne et sa chef, Ursula, feront-elles aussi les gros yeux à la pseudo prude mais très réactionnaire Pologne, pour l’exploitation d’esclaves Nord Coréens au sein d’entreprises stratégiques comme les chantiers navals de Gdansk, berceau de Solidarnosc!!!?) ?
Actuellement, il « reste » environ 30000 Nord Coréens bossant pour leur patron dans l’UE.
Mais ça fait moins le buzz..et puis la Corée du Nord, c’est loin..