Premier et rare secteur excédentaire pour la balance commerciale française (+29,6 milliards d’euros en 2019), l’industrie aéronautique française a été emportée dans l’effondrement du trafic aérien mondial causé par la crise sanitaire de Covid-19.

Chef de file de toute la filière, l’avionneur Airbus a réduit sa production dès avril 2020 de près de 40% et annoncé la suppression de 15 000 emplois, dont 5 000 en France. Ses sous-traitants, souvent des PME et entreprises de taille intermédiaire (ETI), ont vu du jour au lendemain disparaître près de la moitié de leur activité. Lauak, Mecachrome, AAA, Daher… les plans sociaux se sont multipliés. Dès le mois de septembre 2020, les services de l’État recensaient 27 plans de sauvegarde de l’emploi (PSE) dans l’aéronautique pour la seule région Occitanie, où sont implantés Airbus et nombre d’entreprises du secteur.

Limiter la casse
Sur les neuf premiers mois de 2020, 5 800 emplois -hors intérim- ont été supprimés dans le Grand Sud-Ouest dans l’aéronautique, selon l’Insee. La filière en France représente 300 000 emplois directs et indirects dans 1 300 entreprises industrielles, selon Bercy.

Comme pour l’ensemble de l’économie, l’État a soutenu le secteur, à coups de prêts garantis (PGE), de chômage partiel et 15 milliards d’euros -dont 7 milliards au profit d’Air France – pour un plan de soutien de la filière. Tous les acteurs s’accordent à dire que cette action a pour l’instant permis de «limiter la casse». «On avait à peu près 60 000 emplois menacés sur 2020-2021 et nous pensons que nous avons déjà pu en sauver la moitié, c’est-à-dire 30 000 personnes», selon le président du Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas), Éric Trappier.

Plusieurs plans sociaux ont ainsi pu être revus à la baisse, notamment à la faveur du dispositif d’allocation partielle de longue durée (APLD), reconnaisent les syndicats du secteur. Ainsi, le motoriste et équipementier Safran a réussi à maintenir ses 44 000 effectifs en France (hors intérim), l’équipementier Latécoère va supprimer moitié moins de postes que prévu (246 sur 1 500), Figeac Aero un tiers de moins. Même à Airbus, les syndicats pensent pouvoir éviter tout licenciement sec.

Regroupements à l’horizon ?
Mais avec la poursuite de la crise sanitaire et des restrictions de déplacement, le secteur n’est pas à l’abri d’un scénario catastrophe. «Le temps passe, la situation est difficile, les aides de l’État ne vont pas être éternelles, elles ne suffisent pas à vivre sous cloche éternellement», note Bertrand Mouly-Aigrot, du cabinet Archery consulting, cité par l’AFP. Pour autant, «avec les restructurations et le redimensionnement qui ont été faits, avec la consolidation qui doit s’opérer en 2021, l’industrie est suffisamment forte pour s’en sortir, si l’on croit à l’hypothèse optimiste d’une sortie progressive du mode crise à partir de l’été», explique-t-il.

L’un des enjeux pour rebondir, c’est une probable union des forces : si elles ont pu préserver les compétences, de nombreuses entreprises trop petites et désormais fragilisées doivent se regrouper pour pouvoir affronter la concurrence et les enjeux industriels de l’aviation décarbonée.

Emploi : l'industrie aéronautique mise sous perfusion par l'État 1 Air Journal

@ATR