L’autorité de régulation des transports (ART) a homologué les hausses tarifaires de +2,5% demandées par ADP, alors que le transport aérien traverse la pire crise de son histoire pour cause de pandémie de Covid-19 et que la baisse du trafic aérien atteint 70% en France.

Cette hausse des redevances payées par les compagnies aériennes au groupe gestionnaire des aéroports de Paris-CDG, Orly et Le Bourget (mais aussi de « dix plateformes d’aviation générale, d’un héliport et de plus d’une vingtaine d’aéroports dans le monde ») a été approuvée par l’ART : celle-ci justifie sa décision par le fait que la société ADP « respecte la règle selon laquelle le produit global des redevances n’excède pas le coût des services rendus avec un taux de couverture des services publics aéroportuaires de [60-70] % pour la période tarifaire 2021 et selon les prévisions de trafic actualisées ». Les évolutions proposées par le groupe étaient, en moyenne, de l’ordre de :

 

  • +3,00 % pour les tarifs unitaires de la redevance par passager ;
  • +1,48 % pour ceux de la redevance de stationnement ;
  • +1,58 % pour ceux de la redevance d’atterrissage ; 
  • +2,65 % pour les autres redevances aéroportuaires soumises à l’homologation de l’Autorité, hors redevance d’assistance aux PHMR. 

Concernant la redevance d’assistance aux PHMR pour les aéroports de Paris-Orly et Paris-Charles de Gaulle, la société ADP indique que l’évolution moyenne des tarifs de cette redevance, en prenant en compte les modifications susmentionnées, permettrait d’atteindre une hausse des recettes prévisionnelles de l’ordre de +2,5%.

Selon le SCARA, Syndicat des Compagnies AéRiennes Autonomes qui « regroupe 50% des compagnies aériennes françaises, basées en métropole et dans les territoires ultra-marins ainsi que des sociétés d’assistance aéroportuaire et de formation », cette décision de l’ART est « d’autant plus incompréhensible qu’elle ne repose sur aucun fondement raisonnable », comme le note l’ART elle-même dans son rapport : « le manque de transparence de la consultation menée par la société ADP », « le dossier ne mentionnait, ni les objectifs d’évolution de charges sur le périmètre régulé, ni le niveau de la base d’actifs régulés ». L’ensemble du processus qui a amené l’ART à l’homologation des tarifs d’ADP « dans une totale opacité, et en faisant abstraction de la crise économique mondiale, montre les limites du système », poursuit le SCARA : « ce dernier avatar d’un temps révolu met en évidence l’urgence de la refonte de la relation aéroportuaire », qu’il a demandé depuis le début de la crise sanitaire dès le mois de mars.

Pendant ce temps, ailleurs dans le monde, les aéroports réduisent ou gèlent leurs tarifs pour accompagner le transport aérien dans la crise sanitaire, l’association égrenant les exemples :

  • Europe : Amsterdam, Londres, Zurich, Rome, Francfort, Bruxelles, Milan, Stockholm, etc.
  • Moyen-Orient : Dubaï, Djeddah, Riyad, etc.
  • Asie : Pékin, Shanghai, Canton, Hong-Kong, etc.
  • Amérique : Bogota, Cancun, Mexico, Santiago du Chili, Sao Paulo, etc.

En France, seuls trois aéroports français demandaient une augmentation de leurs tarifs : ADP donc (+2,5%), Lyon (+9%) et Marseille (+8,2%) ; les augmentations demandées par ces deux derniers aéroports pour 2021 ont été invalidées par l’ART. Dans ce contexte, la seule bonne décision eût été un gel des tarifs pour 2021 : il est en effet « inadmissible qu’ADP continue sa quête effrénée d’un profit maximal au détriment de ses clients, compagnies aériennes ».

En 15 ans, ADP a selon le SCARA « augmenté ses tarifs de 48,1% alors que l’inflation dans le même temps était de 21,6% et que le prix des billets d’avion a baissé de 10% à 15% ». Ces augmentations de tarif de plus de deux fois l’inflation « ont largement profité à ADP qui, depuis plus de 10 ans enregistre des bénéfices de l’ordre de 15 % de son chiffre d’affaires. Pour mémoire, les bénéfices des compagnies aériennes se situent en 1% et 4% de leur chiffre d’affaires les meilleures années ». Par ces temps de crise sanitaire, ADP « se devrait de participer à l’effort de l’ensemble du transport aérien » en puisant dans ses réserves financières et non pas en alourdissant une fois de plus les charges des compagnies aériennes.

La refonte de la gestion des plateformes aéroportuaires françaises doit passer selon le SCARA par :

  • L’abandon du système de « double caisse » contraire à l’intérêt général,
  • L’arrêt des privatisations d’infrastructures stratégiques pour la Nation,
  • La reprise par l’État de ses fonctions régaliennes dans les aéroports, à commencer par la sûreté.

Redevances d’aéroport : les +2,5% accordés à ADP scandalisent le SCARA 1 Air Journal

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