La compagnie aérienne low cost Norwegian Air Shuttle a placée sous protection contre les créanciers ses deux filiales International et Arctic Assets Aviation, espérant trouver une solution financière à l’impact de la pandémie de Covid-19. Le groupe AirAsia en a fait de même pour sa filiale au Japon, celle en Inde étant proche de suivre le même chemin.

Après avoir annoncé la semaine dernière une perte trimestrielle de 91,5 millions d’euros, et n’avoir plus que 318 millions d’euros de trésorerie alors que le gouvernement norvégien lui avait refusé une aide publique supplémentaire, la spécialiste du vol pas cher tente une opération de dernière chance. Alors que ses employés manifestaient devant le siège à Oslo le 18 novembre 2020, Norwegian a mis ses deux filiales sous la protection de la loi irlandaise sur les faillites, équivalent du Chapter 11 aux Etats-Unis. Norwegian Air International, basée à Dublin, opère avec 24 Boeing 737-800 une partie des vols européens de la low cost depuis des aéroports au Danemark, en Finlande, au Royaume Uni et en Espagne. Arctic Aviation Assets DAC, également basée en Irlande, loue depuis 2016 les avions de la famille Airbus A320neo acquis par le groupe (par exemple à HK Express).

Norwegian précise dans son communiqué qu’elle est également sous protection contre les créanciers « en temps que partie liée ». La low cost, qui a choisi un processus irlandais puisque ses actifs aéronautiques sont détenus dans le pays, a pris cette décision « dans l’intérêt de ses parties prenantes ». Le but du processus est de réduire la dette, de redimensionner la flotte et d’obtenir de nouveaux capitaux ; il protège les actifs du groupe Norwegian « tout en permettant à l’entreprise de se concentrer sur le redimensionnement du groupe », et devrait prendre jusqu’à cinq mois.

Norwegian continuera d’exploiter son réseau et de négocier normalement ses actions à la bourse d’Oslo. Le programme de fidélité Norwegian Reward continuera « d’honorer et de rapporter »  des CashPoints pour ses membres. « La sauvegarde du plus grand nombre d’emplois possible, tout en redimensionnant sa base d’actifs, restera une priorité absolue pour l’équipe de direction tout au long de ce processus », précise le communiqué. Norwegian n’opère plus que sur 12 routes domestiques, onze au départ de l’aéroport d’Oslo-Gardemoen (vers Alta, Bergen, Bodø, Evenes, Haugesund, Kirkenes, Molde, Stavanger, Tromsø, Trondheim et Ålesund) et celle entre Tromsø et Longyearbyen.

Selon le CEO de Norwegian Jacob Schram, chercher une protection pour se réorganiser en vertu de la loi irlandaise « est une décision que nous avons prise pour assurer l’avenir de Norwegian au profit de nos employés, clients et investisseurs. Notre objectif est de trouver avec nos parties prenantes des solutions qui nous permettront d’émerger comme une compagnie aérienne financièrement plus forte et plus sûre ». Le processus irlandais « permet aux entreprises financièrement viables de traiter des éléments de l’entreprise qui nécessitent une restructuration dans le but de protéger les emplois et de préserver la valeur fondamentale de l’entreprise. Cette protection, par le biais d’un examinateur désigné par le tribunal, permet en fin de compte à une entreprise de sécuriser un nouveau capital et de mettre en œuvre un système juridiquement contraignant pour le règlement des dettes ».

Son intention est claire, affirme le dirigeant : « nous sortirons de ce processus comme une compagnie aérienne plus sûre financièrement et compétitive, avec une nouvelle structure financière, une flotte redimensionnée et une offre client améliorée ». Il précise que sur la base de la situation de trésorerie actuelle de Norwegian et des prévisions pour l’avenir, la société estime avoir suffisamment de liquidités pour passer ce processus.

Alors qu’elle comptait environ 10.000 salariés fin 2019, Norwegian n’aura plus que 600 employés dans les mois à venir. La flotte opérée passera elle de 21 à 6 Boeing 737-800. Rappelons qu’en juin dernier, Norwegian avait annulé une commande de 97 Boeing d’un montant théorique de 5,5 milliards de dollars. Cela concernait les 92 737 MAX 8 encore attendus (18 ont déjà livrés à trois filiales), ainsi que les cinq derniers 787-9 Dreamliner commandés (29 en service plus huit 787-8).

Basé en Malaisie, le groupe low cost AirAsia a de son côté annoncé mardi le dépôt de bilan de sa filiale japonaise, dont il détenait 33% du capital aux côtés entre autres du groupe Rakuten. AirAsia Japan, basée à Nagoya-Chubu Centrair, avait déjà mis fin à ses opérations sous code DJ début octobre : elle a décidé de mettre la clé sous la porte « en raison de l’insolvabilité résultant d’une baisse de la demande, induite par les restrictions de voyage liées à la pandémie de coronavirus », précise un communiqué aux autorités boursières. LA filiale avait une dette d’environ 176 millions d’euros, sans oublier plus de 4 millions d’euros de remboursements pour quelque 23.000 billets d’avion annulés (elle a promis de le faire d’ici la fin du mois). AirAsia Japan avait licencié au début novembre 230 de ses 280 employés encore en poste.

Avec une flotte limitée à trois Airbus A320 (un A320neo en commande), la low cost japonaise n’a jamais atteint la masse critique pour concurrencer les Jetstar Japan et autres Skymark. Cette disparition n’entraine aucun changement pour les autres compagnies du groupe AirAsia, qui reprendront leurs vols vers le Japon depuis la Malaisie, la Thaïlande et les Philippines après la levée des restrictions de voyage et la réouverture des frontières.

Le groupe a d’autre part annoncé hier qu’il « pourrait également quitter sa coentreprise AirAsia India » (30 A320, tous loués sauf un, et un A320neo), dans laquelle il détient une participation de 49% aux côtés de Tata Sons – qui envisageait déjà de la racheter complètement. « Nos activités au Japon et en Inde ont épuisé leurs liquidités, ce qui a provoqué de fortes tensions financières pour le groupe. La maîtrise des coûts et la réduction de la consommation de liquidités restent des priorités clés évidentes », précise AirAsia dans un communiqué distinct. « Une stratégie détaillée d’optimisation du réseau et de la flotte a été mise en œuvre sur l’ensemble du réseau, mettant en place les bonnes bases pour un avenir durable et viable. Nous révisons continuellement notre réseau pour nous assurer que nous proposons les itinéraires les plus populaires et les plus rentables ». AirAsia India détenait en septembre 6% de part du marché indien.

En revanche le groupe affiche une plus grande confiance pour les résultats de ses autres filiales en Asie du sud-est (basées à Bangkok, Jakarta ou Manille), y compris celles d’AirAsia X dédiées au long-courrier – pour lesquelles une restructuration de la dette de près de 13 milliards d’euros avait été proposée le mois dernier. « Les perspectives générales sont que les voyages aériens vont bientôt rebondir; nous prévoyons de revenir aux niveaux d’avant la pandémie sur de nombreuses routes à travers le groupe d’ici la mi-2021, voire plus tôt », a déclaré le président du groupe Bo Lingam. Soulignant qu’en Thaïlande les capacités actuelles sont proches de 100% des niveaux d’avant la crise sanitaire.

Faillites de low cost : 2 filiales de Norwegian et AirAsia Japan 1 Air Journal

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