La compagnie aérienne Korean Air et sa maison-mère Hanjin KAL (holding de Hanjin Group) ont confirmé lundi le projet d’acquisition d’Asiana Airlines, l’ensemble devant figurer parmi les 10 plus grands transporteurs mondiaux. Des questions restent posées, notamment sur leur réseau comme sur la présence de Star Alliance en Corée du Sud.

Le conseil d’administration de la compagnie nationale sud-coréenne a confirmé le 16 novembre 2020 la rumeur apparue la semaine dernière ; l’accord avec sa rivale privée est présenté comme « une nouvelle dynamique pour restructurer le marché de l’aviation sud-coréenne en proie à une crise sans précédent, en raison de la pandémie de Covid-19 à laquelle est confrontée l’industrie mondiale de l’aviation ». Korean Air envisage d’acquérir au total 63,9% du capital d’Asiana Airlines pour environ 1,4 milliard d’euros (1800 milliards de wons sud-coréens), un montant qui sera garanti par une augmentation de capital de 1,9 milliard d’euros via l’émission de nouvelles actions début 2021. Selon un accord avec la Korea Development Bank (KDB), Hanjin KAL recevra de la part de la banque publique un investissement de 608 millions d’euros – qui seront prêtés « immédiatement » à Korean Air : elle investira 228 millions d’euros pour acquérir des obligations convertibles perpétuelles d’Asiana Airlines, et utilisera en plus la même somme comme « acompte pour le contrat de 1,1 milliard d’euros afin d’acquérir les nouvelles actions d’Asiana Airlines ».

L’investissement initial de Korean Air permettra à Asiana Airlines d’obtenir le financement nécessaire à ses opérations jusqu’à la fin de l’année, ainsi que « d’améliorer sa situation financière en ajoutant 228 millions d’euros d’obligations convertibles perpétuelles à ses immobilisations ». Compte tenu de la crise à laquelle l’industrie aérienne est actuellement confrontée, il était « inévitable de restructurer l’ensemble du marché, y compris Korean Air, Asiana Airlines, les transporteurs low-cost et les industries concernées » (la première détient la low cost Jin Air, tandis que la seconde a créé Air Busan et Air Seoul). Les actions de KDB seront des actions ordinaires avec droit de vote, et la banque publique « surveillera et s’assurera que Hanjin KAL et Korean Air donnent suite à leurs plans d’acquisition ».

La raison principale de la décision de Korean Air « en ce moment est de stabiliser l’industrie aéronautique sud-coréenne » en pleine crise sanitaire. Étant donné que la situation financière de la compagnie nationale « pourrait également être menacée » si la situation se prolonge, il est inévitable de restructurer le marché de l’aviation domestique pour améliorer sa compétitivité et minimiser l’injection de fonds publics. Korean Air a décidé d’acquérir Asiana Airlines « après mûre réflexion et délibération afin de poursuivre sa mission initiale de contribuer à la nation par le développement du transport. À l’issue de sa mission, le transporteur assurera la sécurité de l’emploi des employés des deux compagnies aériennes ainsi que des secteurs concernés, et soutiendra le développement de l’industrie aéronautique coréenne ».

Lorsque Korean Air aura finalisé l’acquisition d’Asiana Airlines, la compagnie aérienne devrait être classée parmi les 10 premières compagnies aériennes au monde (selon l’IATA, Korean est 19eme et Asiana 29eme). « En général, les pays de moins de 100 millions d’habitants ont une seule compagnie nationale. Cependant, la Corée du Sud a deux transporteurs nationaux, ce qui lui donne un désavantage concurrentiel par rapport à des pays comme l’Allemagne, la France et Singapour » avec leurs seules Lufthansa, Air France ou Singapore Airlines. De fait, cette acquisition facilitera l’extension du réseau mondial, de la flotte d’avions et des capacités de Korean Air, « favorisant la compétitivité nécessaire pour concurrencer les méga-compagnies aériennes mondiales ». Plus de créneaux horaires obtenus à l’aéroport international de Séoul-Incheon via cette consolidation « pourraient entraîner une augmentation des coentreprises avec des compagnies aériennes mondiales et une demande de correspondances accrue, ce qui stimulera également la croissance de l’industrie aéronautique nationale ». Les passagers pourraient ainsi « profiter d’un plus large éventail de choix d’itinéraires et d’horaires de vols. Ils pourront également bénéficier d’options de transferts simplifiées, d’un programme de fidélité intégré et d’une sécurité accrue dans tous les domaines ».

Le président de Korean Air, Cho Won-tae, a déclaré que sa société avait pris la décision de soutenir la croissance durable du secteur : « Korean Air souffre de difficultés avec la pandémie. Mais nous avons pris notre décision pour une croissance durable de l’industrie aéronautique du pays et pour réduire le fardeau de la population et minimiser l’injection de fonds publics ». Il a ajouté qu’il travaillerait pour unir les deux entreprises et garantir l’égalité des droits pour les employés « sans aucune discrimination ». Les syndicats des deux compagnies aériennes ont unanimement condamné cette consolidation pour laquelle ils n’ont pas été consultés, et demandé l’ouverture de négociations « incluant les salariés ».

Korean Air devrait faire pression pour une restructuration et des fusions de ses filiales à l’avenir, a déclaré un responsable du transporteur au Korea Herald. « En fin de compte, l’objectif serait d’unir complètement les deux sociétés, vous pouvez donc vous attendre à ce que la marque, Asiana Airlines, ne soit pas maintenue », a-t-il déclaré. Le vice-président de la KDB Choi Dae-hyun a de son côté déclaré aux journalistes que Hanjin prévoyait de fusionner « par étapes » les filiales Jin Air, Air Busan et Air Seoul. Les deux groupes représentent aujourd’hui plus de 60% du trafic aérien en Corée du Sud.

Outre la question d’un feu vert du régulateur de la concurrence en Corée du Sud, celle du réseau résultant de ce rachat se pose : Korean Air opérait avant la crise sanitaire 148 routes et Asiana Airlines 97, mais selon anna.aero près de 70% de ses lignes étaient opérées par les deux concurrentes (63 routes dont 59 à l’international y compris Paris-CDG, et 53 au départ d’Incheon). Korean Air ne pourrait guère étendre son réseau à de nouvelles destinations donc. Sur le plan domestique, l’une des routes les plus denses au monde, entre Seoul-Gimpo et Jeju, verrait alors une compagnie unique proposer plus de 50 rotations quotidiennes, face à la concurrence des low cost. Autre point non évoqué dans le communiqué d’hier, les alliances : Korean Air est membre de SkyTeam et Asiana Airlines de Star Alliance, cette dernière devant a priori dire adieu à sa présence dans le pays.

Korean Air veut se payer Asiana Airlines pour 1,4 milliard d’euros 1 Air Journal

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