La compagnie aérienne Brussels Airlines va bénéficier d’un prêt de 290 millions d’euros sur 6 ans, la Belgique ayant reçu en particulier l’assurance qu’aucun centime n’ira dans les caisses de sa maison-mère le Groupe Lufthansa. Un projet sous réserve d’acceptation par les actionnaires et la commission européenne, et qui comporte encore des zones d’ombres.
Dévoilé le 21 juillet 2020 par le gouvernement mais toujours pas officiellement par le groupe, le projet d’accord pour sauver la compagnie nationale belge serait accompagné d’un certain nombres de conditions : le maintien de la marque Brussels Airlines, la réception de l’ensemble des fonds, ou selon la RTBF le fait que si la filiale belge « n’est pas en mesure de rembourser le prêt et que Lufthansa n’intervient pas, ces actions reviendront au fédéral », et que le gouvernement « peut aussi compter sur deux sièges au sein du conseil d’administration de Brussels Airlines ».
Brussels Airlines devrait donc continuer d’exister avec un siège social à l’aéroport de Bruxelles-Zaventem et un AOC (certificat d’opérateur aérien) belge ; son éventuelle intégration dans le projet Ocean du groupe Lufthansa serait donc impossible. Enfin la compagnie devrait développer son activité long-courrier, la relance de plusieurs liaisons ayant été reportée en raison de l’impact de la pandémie de Covid-19.
Ce projet d’accord doit « mener à une croissance bénéficiaire » pour Brussels Airlines, a affirmé hier soir le ministre des Finances Alexander De Croo ; « c’est non seulement important pour les perspectives d’emploi, mais aussi pour le rôle économique du cluster entourant Brussels Airport, le deuxième pôle économique le plus important du pays ». Mais le projet doit encore être présenté à la Commission européenne, et le gouvernement belge, les conseils d’administration du groupe Lufthansa et de Brussels Airlines, ainsi que de fonds de stabilisation de l’économie allemande doivent donner leur feu vert « d’ici la fin du mois » pour que l’accord puisse se concrétiser.
S’il spécifie pour la compagnie de Star Alliance « l’importance des préoccupations écologiques », une réduction de l’empreinte environnementale et un « verdissement » de la flotte étant demandés une fois la crise sanitaire passée, les associations écologistes dont Greenpeace ont dénoncé un « chèque en blanc ». Un texte commun à quatre d’entre elles résume : « il est incompréhensible que cet accord ne soit pas lié à une taxation équitable, c’est-à-dire proportionnée à l’impact environnemental du secteur, à des objectifs climatiques ambitieux et à des conditions sociales ».
Même questions pour des députés verts, selon qui s’il est positif que Lufthansa intervienne à hauteur de 170 millions d’euros, les conditions liées au prêt de 290 millions d’euros octroyé à l’entreprise par le gouvernement fédéral « restent trop floues ». « Quelles garanties sociales et environnementales ont été négociées par le gouvernement? Y a-t-il un objectif clair de réduction d’émissions de CO2? Y a-t-il des engagements forts à restructurer le secteur au niveau européen, à revoir la fiscalité sur le kérosène ou à réduire les vols de courte distance? », ont demandé députés Gilles Vanden Burre et Dieter Van Besien.
Rappelons que Brussels Airlines a conclu fin juin un accord avec ses partenaires sociaux sur des mesures structurelles « ouvrant la voie à un avenir rentable à long terme » mais qui menace un quart des plus de 4000 postes. Hier, les syndicats CNE et ACV Puls annonçaient qu’ils signeront « à regret » ces conventions collectives, avec le sentiment d’avoir été « pris au piège ». Ils dénoncent une flexibilité « irresponsable et dangereuse » imposée au personnel. Imposer une restructuration conditionnée à un refinancement de l’entreprise « est inacceptable » pour le syndicat CNE, selon qui « aucune compagnie aérienne, durant cette crise sanitaire exceptionnelle n’a proposé un tel agenda, si ce n’est Ryanair ».
Le mois dernier, le groupe Lufthansa laissait entendre qu’il pourrait se débarrasser de sa filiale belge, la laisser tomber en faillite ou bien la vendre ; depuis, les actionnaires ont approuvé l’aide d’Etat de 9 milliards d’euros (en échange d’une entrée dans son capital à hauteur de 20%), mais le groupe envisage toujours de supprimer 22.000 emplois équivalent temps plein, soit 16% des effectifs mondiaux, dont la moitié en Allemagne.
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