Le SCARA a publié une liste de propositions pour un soutien efficace de l’État au transport aérien dans la sortie de crise du Covid-19, incluant un moratoire de douze mois sur la totalité du coût des infrastructures de navigation aérienne et aéroportuaires. Et il précise que ce soutien ne devra pas bénéficier qu’au seul groupe Air France, tandis que la privatisation d’ADP devrait être abandonnée.
Le Syndicat des Compagnies AéRiennes Autonomes (SCARA), un syndicat professionnel regroupant 47% des compagnies aériennes françaises basées en métropole et dans les territoires ultra-marins, ainsi que des sociétés d’assistance aéroportuaire et de formation, a publié le 14 avril 2020 une tribune proposant de « repenser totalement le rôle de l’État dans le transport aérien français ». « Dans l’urgence », l’État a paré au plus pressé pour aider nos compagnies aériennes », rappelle le syndicat : mesures élargies de chômage partiel, report de dates de validité des agréments et des licences, moratoires sur les charges fiscales et sociales notamment. « Si les mesures destinées à alléger les charges de personnels inoccupés sont louables », les moratoires appréciables pour nos trésoreries à court terme ne font que reporter les difficultés financières à un moment où les compagnies aériennes auront besoin d’encore plus de soutien pour asseoir leur redémarrage. Un point de vue déjà évoqué au début du mois.
Le SCARA propose donc une série de mesures « à court terme simples et efficaces », l’État devant selon lui reprendre à sa charge le financement de missions d’intérêt général « qu’il a abandonné au cours du temps » :
– La taxe d’aéroport, qui finance la sûreté et la sécurité en aéroports, est acquittée par les compagnies aériennes pour chaque départ et a représenté en 2019 un montant d’1,1 milliards d’euros.
– Le coût du contrôle aux frontières automatisé (PARAFE) qui ne cesse de croître.
– La taxe de solidarité sur les seuls billets d’avion, dite « Taxe Chirac », pour financer l’aide à l’achat de médicaments pour les pays en voie de développement a représenté en 2019 un montant de 252 millions d’euros.
– L’écotaxe sur les billets d’avions mise en œuvre cette année au profit notamment du développement du transport ferroviaire aurait dû représenter un montant de 182 millions d’euros.
L’État devrait aussi également prendre à sa charge, au moins pendant une période 12 mois après la fin de la période d’urgence sanitaire, « la totalité du coût des infrastructures de navigation aérienne et aéroportuaires ». Le budget de l’Aviation Civile a représenté 2,2 milliards d’euros en 2019, rappelle le SCARA, dont 1,6 milliards pour la seule navigation aérienne, et l’ensemble des redevances aéroportuaires acquittées en France par les compagnies aériennes en 2019 est estimé à plus de 1,5 milliards d’euros. Après cette période transitoire de 12 mois durant laquelle « l’État prendrait en charge directement ces taxes et redevances », des discussions devront être menées pour en étudier une plus juste répartition entre l’État et d’autres acteurs économiques. « S’agissant de la contribution de ces acteurs économiques », le SCARA propose d’élargir l’assiette des taxes relevant de la solidarité, de la transition écologique et de la sûreté, à d’autres que les seules compagnies aériennes.
« Si on peut comprendre l’intervention de l’État auprès du groupe Air France en sa qualité d’actionnaire, celle-ci ne doit pas se limiter aux seules compagnies aériennes qui le composent », souligne le syndicat pour qui il est « primordial que toute aide dans ce domaine soit transparente et puisse bénéficier de manière équitable à l’ensemble des compagnies aériennes françaises ».
Une réforme profonde du financement des aéroports
Lors de l’ouverture des Assises du Transport Aérien de 2018, Elisabeth Borne déclarait que les Aéroports de Paris sont « un actif vraiment stratégique pour les connexions entre la France et le reste de la planète ». Il en est de même de tous les aéroports français, qui participent à l’aménagement du territoire. Le SCARA estime donc nécessaire que l’État « reprenne pied dans les aéroports et renonce à toute nouvelle privatisation, voire redevienne majoritaire dans les privatisations déjà réalisées à Lyon, Toulouse ou Nice ». Il pourra ainsi être mis fin au système de double caisse « aussi néfaste pour les compagnies aériennes que pour l’intérêt général », comme l’ont démontré tous les experts économiques et l’étude commanditée par le SCARA et la Chambre Syndicale du Transport Aérien (CSTA). Un retour à la caisse unique pour ADP « permettrait de faire baisser les redevances acquittées par les compagnies aériennes de 400 millions d’euros, qui représentent le profit réalisé par ADP sur les commerces », précise le syndicat ; « le temps n’est plus à la seule protection des intérêts financiers des investisseurs dans les aéroports ».
Il y a trois ans, le SCARA publiait une réflexion intitulée « Pour une réaffirmation du rôle de l’État dans le développement équitable du transport aérien français ». A un moment où l’État va devoir intervenir massivement pour aider nos compagnies aériennes à sortir de la crise Covid-19, « les propositions que nous faisions à l’époque sont plus que jamais d’actualité ».
Sam a commenté :
15 avril 2020 - 9 h 31 min
On pourrait donc nationaliser les aéroports, histoire d’éponger les pertes, et quand le temps des profits sera revenu, les redonner au privé qui sait mieux que tout le monde comment gérer de telles structures.
On nationalise les pertes et on privatisera les profits….
Mais... a commenté :
15 avril 2020 - 12 h 10 min
ADP premier mondial en appartenant à l’Etat français
Tu disait ?
alloons a commenté :
18 avril 2020 - 16 h 22 min
Pas en totalité, 49% d’ADP sont sont détenus par des fonds privés, fonds qu’il aurait fallut dédommager à coup de milliards si l’entreprise aurait été totalement privatisée sous forme de concession.
E caux a commenté :
15 avril 2020 - 9 h 58 min
Miam miam, ça fleure bon le tiroir-caisse.
On va vite voir si le nouveau monde rejoint l’ancien..
– restructurer en regard des vrais besoins, avec une approche exhaustive et une politique adéquate. Courageux et nécessaire mais peut-être saignant
– ou bien, comme le relève SAM, nationaliser les pertes et privatiser les profits. Ça, on sait faire; et comme c’est l’âne contribuable qui paie.. pourquoi se gêner?
À savoir que dans l’option 2, les détenteurs actuels seront ceux qui rachèteront lors de la privatisation et gagneront deux fois.
À deux ans des présidentielles,l’option 2 aura les faveurs du pouvoir.
Pas de vagues..
Jean Pierre a commenté :
15 avril 2020 - 18 h 16 min
Le secteur est moribond mais il ne manque pas de médecins pour expliquer qu’ils ont le bon médicament. C’est quoi ce SCARA qui a la pilule miracle ?
Just Biou a commenté :
16 avril 2020 - 18 h 08 min
Nationaliser les pertes, privatiser les profits. C’est caricatural.
Si les choses sont faites correctement la chronologie devrait être la suivante :
–L’entreprise ABC a des pertes de X millions d’euros et sa valeur boursière est de Y millions €.
–L’État nationalise au prix du marché et éponge les dettes.
–L’entreprise rebondit; au bout de quelques années, elle vaut 2Y, 3Y, 4Y millions d’euros.
–L’État reprivatise l’entreprise à un prix largement supérieur (2Y, 3Y, …) à ce qu’il a dépensé pour la nationalisation et pour les dettes.
– L’argent public a été bénéficiaire pour tout le monde, dont les salariés et l’Etat lui-même.
Ce schéma a-t-il été respecté jusqu’à présent ? Il faut voir, cas par cas, sur les années antérieures.
Sauf erreur de ma part, c’est ce qui s’est passé avec Air France. La vente d’une partie importante du capital d’Air France a couvert très largement les fonds que l’Etat avait apportés en 1995.
Si je me trompe, je remercie les lecteurs de corriger avec des chiffres précis.
C’est un schéma plus ou moins similaire qui aurait pu être amorcé à la fin des années 30 en créant la SNCF, qui est devenue un très bel outil industriel alors que la demi-douzaine de grandes compagnies ferroviaires privées était en train de décliner.
Par la suite, l’erreur politique a été de ne pas privatiser (au moins en partie) la SNCF et de la laisser sombrer dans une fonctionnarisation néfaste.
Il est vrai que les années 30 ont été suivies de la guerre et de la reconstruction. La privatisation était alors impossible pour des raisons financières (manque d’investisseurs) et surtout politiques.
Nous ne sommes plus dans ces contraintes. Une nationalisation (partielle?) de compagnies aériennes et d’aéroports serait un moindre mal. Regardez ce que le gouvernement américain a fait en 2008 avec General Motors. Cela valait quand même mieux que de mettre en faillite l’un des plus grands constructeurs d’automobiles du monde.
E caux a commenté :
17 avril 2020 - 17 h 30 min
Privatiser les profits est fréquent.
Le plus brillant récent exemple d’incompétence (ou de collusion tellement l’embrouille est grossière) est celui de Blagnac.
Qui exige que les choses soient faites « correctement »?
Les responsables du gaspillage du bien public ont été promus et décorés..
allons a commenté :
18 avril 2020 - 16 h 24 min
” les fonds que l’Etat avait apportés en 1995.” Vous oubliez le soutien d’ ADP à l’époque qui effaçait toutes les ardoises …