La présidence croate du Conseil européen a proposé de modifier la directive EU261/2004 codifiant les compensations par les compagnies aériennes en cas de retard ou d’annulations de vol, menaçant les droits de quelque 900 millions de passagers.
Le règlement CE 261/2004 encadre la responsabilité des transporteurs aériens au sein de l’Union européenne et prévoit des obligations envers les passagers victimes de retard, de refus d’embarquement, de correspondance manquée et d’annulation de vol. Complété par l’arrêt Sturgeon (19 novembre 2009) de la CJUE qui reconnaît aux passagers d’un vol retardé les mêmes droits qu’à ceux ayant subi une annulation de vol quand la compagnie est la cause du retard, ce règlement européen « a protégé avec succès les droits de plus de 900 millions de passagers chaque année », souligne dans un communiqué AirHelp. Selon qui après 15 ans de protection réussie des passagers aériens dans toute l’Europe, ce règlement « est actuellement confronté à sa plus grande menace depuis sa création : les compagnies aériennes ont essayé d’affaiblir la loi pendant des années, en investissant massivement dans le lobbying afin de minimiser la protection des passagers et de maximiser leurs profits ». Et la semaine dernière, le document de compromis sur la révision du CE 261 a été discuté au sein du groupe de travail du Conseil sur l’aviation.
Les principaux changements au règlement CE 261 seraient selon AirHelp :
- Augmenter la limite de temps pour avoir droit à une indemnisation de la compagnie aérienne – retards et annulations passant d’entre 3 et 9 heures selon la durée de vol à entre 5 et 12 heures ;
- Définir la plupart des perturbations de vol causés par des problèmes techniques comme échappant au contrôle des compagnies aériennes.
De plus, la réduction du montant de la compensation offerte aux voyageurs « inciterait de manière tacite les compagnies aériennes à moins de qualité du service et une forte probabilité que les vols soient retardés ».
Selon Agnès Andes, Senior Social Advertising Manager chez AirHelp, « avec le texte de compromis de la présidence croate, les droits des passagers aériens seraient considérablement réduits. Les suggestions supprimeraient la plupart des droits de plus de 900 millions de voyageurs chaque année. Selon nos calculs initiaux, près de 80% des passagers pourraient perdre leur droit ». Ce règlement est pourtant indispensable à la bonne indemnisation et au respect des droits des passagers aériens, « même si un effort d’information des citoyens demeure indispensable puisque 86% des passagers français et 83% des passagers européens ne connaissent toujours pas leurs droits » selon une étude de YouGov Deutschland l’année dernière. La révision du texte que la présidence croate du Conseil de l’UE est en train de préparer pour une présentation fin juin, provient selon AirHelp « d’une proposition vieille de 7 ans qui réduirait bien de 80% la protection juridique des voyageurs ».
La modification en l’état du règlement créerait « encore plus d’incertitude » pour les passagers aériens et compromettrait l’intention des droits des passagers de l’UE d’avoir « des règles simples et un règlement facile des cas ». La Cour de justice européenne a déjà statué dans les affaires de vols annulés à cause d’incidents techniques, et a clairement déclaré que, sous le régime actuel, les compagnies aériennes sont responsables. « Tout cela disparaîtrait et laisserait les passagers coincés et confus dans la salle des départs, sans aucun droit. Les conséquences seraient catastrophiques pour les droits de l’ensemble des passagers européens qu’ils voyagent pour le travail ou pour rendre visite à leur famille », conclut AirHelp.
Jean Pierre a commenté :
18 février 2020 - 12 h 59 min
La Croatie agit visiblement en sous-marin.
Lionel a commenté :
18 février 2020 - 15 h 13 min
Il s’agit bien d’un règlement et non d’une directive de l’UE.
La différence ? Une fois qu’il a été adopté par le Parlement européen et par le Conseil (les Etats), le règlement s’applique immédiatement dans tous les Etats membres, selon les mêmes modalités (par exemple, dans le cas de EC261/2014, le montant et les critères de la compensation sont identiques partout).
Pour une directive, l’UE (c’est-à-dire le Parlement et le Conseil) adopte un texte qui fixe uniquement un objectif que doivent atteindre les Etats membres, libre à eux de choisir les modalités concrètes pour y arriver (une nouvelle loi nationale, un décret…). Par exemple, l’UE fixe les critères de qualité des eaux de surface, mais chaque Etat fait comme bon lui semble pour atteindre l’objectif.
Inukshuk a commenté :
19 février 2020 - 8 h 31 min
C’est Ryanair qui lui a promis un bon prix pour le rachat de Croatia en échange d’un « petit service »?
La seule question est de savoir qui a corrompu ce « brave » homme…
Dakota a commenté :
19 février 2020 - 11 h 00 min
Le genre d’initiatives qui aide à ” aimer ” l’U.E. Les petits États qui ont peiné à être admis dans l’U.E. parce qu’ils ont ” découvert” tardivement la démocratie et devaient régler quelques petits soucis de corruption généralisée sont pas toujours ” très sympathiques “…