Nouvelles cadences productives, propulsion hybride et automatisation aux commandes sont les défis de demain que devra faire face le transport aérien.
Une tribune de Hélène Doumerc, Key Account Manager Aerospace Défense du Groupe SII
L’industrie aéronautique se porte comme un charme. Le trafic a fait croître la demande en appareils. Rien qu’en France, la barre des 200 millions de passagers a été franchie début 2018. En 2017, le carnet de commande d’Airbus et Boeing s’établissait à près de 12 000 appareils selon le rapport « Industrie du futur » du Pipame (Pôle interministériel de prospective et d’anticipation des mutations économiques). Pour un chiffre d’affaires estimé à 60 milliards d’euros.
Mais si la croissance est au beau fixe, le secteur entame pourtant une mutation plus profonde. Il fait face à de nouvelles cadences productives. La pression écologique exercée par les états et le grand public s’accentue en faveur d’avions plus « verts ». Quand les coûts de la main d’œuvre salariale sont en hausse. En effet, dans les années qui viennent, il faudra former près de 560 000 pilotes supplémentaires. Entre innovation, écologie et maîtrise des coûts, quels sont les enjeux de la filière sur les 10 prochaines années à court, moyen et long termes ?
2019 : vers de nouvelles cadences productives
Le secteur aéronautique est soutenu par une croissance constante du trafic aérien. Depuis 1994, il enregistre une croissance de près de 6% par an selon le rapport de la Pipame. Ces dernières années, cette croissance a été fortement encouragée par le développement des pays émergents et des compagnies low cost. Aujourd’hui, elle l’est également par l’essor du marché des vols régionaux venus moyens courriers d’Asie et d’Afrique. En réponse, les carnets de commande s’emballent.
Et pour répondre à cette forte croissance, le premier challenge des constructeurs à court terme est de monter en cadence afin d’accroître leurs capacités de production annuelle. L’objectif ? Diviser par deux le temps de production. Soit passer des 8 ans traditionnels à une durée de 4 ans, pour sortir un avion d’usine. Le fer de lance de cette industrialisation va de pair avec une digitalisation plus accentuée des usines. De celle qu’a pu connaître l’industrie automobile : robotisation, optimisation des ressources et des flux, capteurs, maintenance prédictive, etc…
2023 : l’hybride décolle
Face aux nouvelles pressions environnementales, le second challenge à moyen terme de l’aéronautique est écologique. En effet, l’industrie serait responsable de 2% des émissions mondiales de carbone à en croire les sources du Guardian et pourrait atteindre les 16% d’ici à 2050. Pour réduire son empreinte carbone, les initiatives pour des avions plus verts, à savoir électriques sont déjà en piste.
L’avion hybride associe déjà réacteurs classiques et batteries. Il est en phase de décollage sur des modèles de petites tailles. Soutenu par Boeing, le ZA – 10, un petit avion de 6 à 12 places, entrera en service à horizon 2023 sur de courts trajets. Safran estime la mise en service d’autres avions hybrides de 10 à 19 sièges à horizon 2025. Faute de batteries et puissances, les gros appareils commerciaux 100% électriques ne sont pas encore réalisables à ce stade. En effet, encore aujourd’hui des batteries 30 fois plus denses que celles utilisées ne pourraient faire voler l’A320 qu’avec la moitié de sa charge et sur des distances 5 fois réduites. Avant le tout électrique, la transition écologique du secteur aéronautique se joue donc d’abord sur le terrain de la motorisation hybride.
2030 : l’automatisation aux commandes ?
A plus long terme, le troisième grand challenge de l’aéronautique repose sur l’automatisation du pilotage. Pour rappel, 30% des salaires de pilotes selon les chiffres d’Air France culminent à 200 000 euros brut. D’ici 2030, l’équipage de bord composée d’au moins 2 pilotes, pourrait se réduire progressivement à grand renfort d’intelligence artificielle dans une perspective de maîtrise des coûts.
Sur les tarmacs de Toulouse, le constructeur Airbus teste déjà un programme de roulage, décollage et atterrissage autonome. En 2023, le projet SPO (Single Pilot Operation) devrait être présenté aux futurs clients pour les vols longs courriers. De concert, les équipementiers de Thalès s’attèlent à la tache. Les économies à réaliser sont d’échelle. Le vol d’un seul pilote ferait l’économie de près de 15 milliards de dollars d’après la banque UBS. 35 milliards pour un avion totalement autonome. Seule ombre au tableau : les réticences restent tenaces et les challenges seront aussi sociaux, culturels que techniques. Selon un sondage UBS, 63% des personnes interrogées refuseraient de monter à bord d’un avion autonome.
Demain, dans 5 ou 10 ans, les défis du secteur aéronautique sont de taille. Industriel d’abord, écologique ensuite, automatique enfin. Pour affirmer sa croissance, ses 3 chevaux de bataille sont les suivants : digitaliser les usines de conception pour accélérer les cadences productives, muer vers le 100% électrique dans les années à venir, et maîtriser les coûts du pilotage grâce au pilotage autonome tout en assurant la sécurité des passagers.
Manu a commenté :
23 juin 2019 - 9 h 29 min
Sans pilote pas pour moi avec un seul pilote oui mais uniquement si il y a un moyen sûre de faire un atterrissage d’urgence électronique facilité et que les PNC sont donc formés à cette manœuvre automatique.
Sinon bonne idée.
Manu a commenté :
23 juin 2019 - 9 h 32 min
On pourrait penser à un boutons n urgence qui donnerait le contrôle de l’appareil à distance à une cellule de deux trois pilotes de la compagnie au siège social et qui pourraient eux faire atterrir l’avion à distance …
Max a commenté :
23 juin 2019 - 15 h 04 min
MANU
– BONJOUR , pas pour demain ni pour après demain rassurez vous ! Mais les études et technologies associées aux systèmes font avancer !
18kh a commenté :
23 juin 2019 - 21 h 25 min
3 défis seulement, c’est un peu court. Il y a bien d’autres points moins visibles.
Pour les cadences d’assemblage, ce n’est finalement qu’un soucis d’investissement et penser comment réduire les cadences lorsque ça ira moins bien.
Pour l’hybride et l’électrique, là c’est moins facile et les échéances annoncées sont perdues d’avance. Si l’hybride marche bien pour une automobile, c’est un non sens pour une machine volante. Et pour l’électrique, la masse des batteries capable de fournir l’énergie nécessaire pour un vol d’un A320 pèse 150 tonnes, Un A320 décolle a la masse max vers 76 tonnes. Ce rapport de masse est valable quelque soit l’avion commercial.
Le vol sans pilote, attendons de voir ce que peuvent dire les passagers et les assureurs. Une fois de plus, ce que l’humain apporte n’est quantifiable qu’une fois qu’il a disparu.
.
Airbid a commenté :
23 juin 2019 - 23 h 41 min
60 millards € pour 12000 appareils ça fait 5 millions l’appareil…j’achète!