Un mois après la tentative d’attentat sur le vol Amsterdam-Detroit, qu’en est-il des nouvelles mesures de sécurité préconisées et donc de la mise en place des scanners corporels ? Les plus hauts responsables des polices des pays européens et nord-américains se sont réunis ce jeudi 21 janvier 2010 à Tolède, en Espagne, afin de faire le point sur les questions de sécurité. Parmi les mesures de contrôle à mettre en place, le scanner corporel continue à ne pas faire l'unanimité au sein de l'Union européenne alors que les Etats-Unis insistent sur sa nécessité. Les scanners corporels sont des portails qui permettent de repérer les objets interdits dissimulés sous les vêtements sans palpation des passagers. Avantage sécuritaire certes mais aussi inconvénient : l’image scannée montre une personne nue, d’où le problème de l’intimité. L’Allemagne est parmi les pays réticents au scanner corporal. Si les bus ou les trains font eux aussi l’objet d’attentats meurtriers, comme à Londres en 2005 ou à Madrid en 2004, les attaques contre les avions sont les seules à susciter une avalanche de mesures de sûreté chaque fois plus contraignantes, rappellent les réticents à Bruxelles. Déjà, soulignent-il, au rythme actuel de renforcement des mesures de sûreté, il faudra pour le moindre trajet se rendre à l’aéroport 3 heures avant l’embarquement et que seuls les passagers attachés à leurs sièges ne présenteront aucun danger… Désaccord entre Européens Avec un tel point de désaccord, on peut déjà se demander si le scanner corporel possède un avenir en Europe ? «Ce thème n'a pas fait l'objet de débat. Nous attendons des rapports de la Commission européenne» concernant «l'efficacité, les effets sur la santé» de ces scanners et les problèmes de respect de «l'intimité» qu'ils posent, a déclaré, à Tolède, le ministre espagnol de l'Intérieur, Alfredo Perez Rubalcaba, dont le pays préside pour six mois le Conseil de l'Union. Il s'exprimait devant Janet Napolitano, la secrétaire américaine à la Sécurité intérieure, dépêchée spécialement par Washington pour tenter de motiver les Européens. La "position européenne commune" souhaitée par Madrid n'est donc pas pour demain… Les Hollandais et les Britanniques ont suivi les Américains, adoptant de suite le scanner corporel. Ainsi, les autorités néerlandaises confirment l'utilisation de scanners corporels complets à l'aéroport d'Amsterdam-Schiphol. Les aéroports britanniques eux-aussi vont progressivement être dotés de scanners corporels complets pour renforcer les contrôles de sécurité. De son côté, l’Italie a décidé l'achat de quinze scanners. Quand à la France, elle prône le principe d'une expérimentation préalable à l'éventuelle généralisation du système. Il est prévu qu'elle commence, d'ici quelques semaines, dans les aéroports parisiens. Six à sept machines seront commandées et installées dans les Aéroports de Paris sur les lignes sensibles. Passenger Name Record Autre point de désaccord à Tolède: l'instauration, au niveau européen, d'un Passenger Name Record (PNR). Le PNR est un vaste fichier informatique qui recueille les données sur les passagers non plus seulement à l'embarquement dans l'avion, mais dès la phase de réservation des billets. L'objectif étant de détecter plus en amont les profils à risques. Les États-Unis ont déjà adopté cette procédure, qui permet de réclamer aux compagnies aériennes desservant leur espace plus d'une trentaine d'informations nominatives sur chaque passager, de son numéro de carte bancaire à son adresse, en passant par les coordonnées de l'agence où il a pu acheter son billet. L'Europe est-elle prête à effectuer ce bond en avant sécuritaire ? Là-aussi la mesure ne fait pas l’unanimité. Trop d’informations tuent l’information, soulignent les Européens s’opposant au PNR. Pour exemple, le passager nigérian, responsable de la tentative d’attentat dans l’avion Amsterdam-Detroit, était non seulement signalé, mais il avait été dénoncé par son père ! Mais cette information était noyée dans la masse. Ces faillites du renseignement de masse n’empêchent pas les Américains d’être toujours plus demandeurs : ils veulent avoir aujourd’hui, via la base PNR, accès aux données concernant des ressortissants de pays tiers qui viennent en Europe. Selon des responsables du ministère de l’Intérieur, l'accord PNR est acquis pour l'Espagne et le Royaume-Uni. Mais l'Allemagne, encore elle, est toujours divisée sur la question». La France s'est faite pressante à Tolède pour que l'Union ouvre le débat sur la question des PNR. A suivre donc…