Estimant que la culpabilité de l’un ou l’autre est « impossible à démontrer », le ministère public n’a requis aucune condamnation dans le procès d’Air France et Airbus, accusés d’homicides involontaires dans le procès en correctionnelle du crash du vol AFF447 qui avait fait 228 victimes le 31 mai 2009. Après les plaidoiries de la défense, le jugement sera rendu le 17 avril 2023.
La justice civile n’est finalement pas plus éclairée que le Bureau d’Etudes et d’Analyses (BEA) : aucune condamnation n’a été demandée le 7 décembre 2022 par les deux procureurs contre la compagnie aérienne et le constructeur de l’A330-200, qui avaient plaidé non coupables début octobre. Air France et Airbus étaient accusés d’avoir sous-estimé la gravité des défaillances de sondes Pitot et de ne pas avoir suffisamment formé les pilotes à ces risques ; les deux sociétés encouraient une amende de 225.000 euros (sans peine de prison).
La colère de certaines parties civiles était audible mercredi après que le procureur a reconnu : « nous savons que cette position sera très probablement inaudible pour les parties civiles, mais nous ne sommes pas en mesure de requérir la condamnation d’Air France et d’Airbus ». La présidente de l’association Entraide et solidarité AF447 Danièle Lamy a dénoncé une « parodie de justice », son avocat affirmant que « le parquet n’a pas été libre, il a reçu des instructions ».
Les plaidoiries de la défense ont suivi, les deux accusées demandant la relaxe. L’avocat d’Air France maître Saint-Pierre défendant « le travail d’analyse de fond du dossier fait par le ministère public » tout en affirmant que son discours aurait été le même en cas de demande de condamnation : « c’est le jeu judiciaire et il faut l’accepter. Ce procès est un modèle de procès, quel que soit le résultat ». Mais il a aussi évoqué comme durant le procès une « collusion » entre Airbus, la DGAC et l’EASA, rappelant « la colère d’Air France et de ses pilotes d’entendre Airbus dire que c’est la faute des pilotes ». Sa collègue Maitre Chemarin a préféré souligné qu’Air France avait « pleinement pris en compte les rapports d’incident rédigés par les pilotes (ASR) » à propos des sondes Pitot, mais n’avait « jamais été avertie par la DGAC des évènements rencontrés par d’autres compagnies, comme Air Caraïbes ».
Les avocats d’Airbus de son côté a de nouveau dénoncé les attaques personnelles contre ses employés dont le président exécutif Guillaume Faury, Maître Ndiaye déclarant selon La Tribune : « nous devons rester attaché à la règle du droit, qui doit faire fi de l’émotion et s’attacher aux faits ». Maitre Beauquier a de son côté rappelé que les pilotes, même s’ils sont « très compétents », sont des hommes « comme vous et moi, ce sont des hommes faillibles, qui sont fragiles. […] La différence, c’est quand un pilote se trompe, et ça arrive, il a la responsabilité de la vie de 228 personnes ». Rappelant au passage qu’Airbus n’avait jamais mis en cause l’équipage avant la découverte des boîtes noires de l’A330, deux ans après l’accident.
Le procès se terminera « le jour du prononcé de la décision », a rappelé Sylvie Daunis, la présidente de la 31e chambre du tribunal de Paris, les trois juges devant rendre leur verdict le lundi 17 avril 2023. Près de treize ans après la disparition de l’avion.
Le crash du vol AF447 dans l’Océan atlantique avait entraîné la mort des 216 passagers et 12 membres d’équipage, et reste à ce jour l’accident le plus meurtrier de l’histoire d’Air France. Le rapport du BEA publié en juillet 2012 expliquait que le givrage en vol de sondes de vitesse Pitot avait conduit à un dérèglement des mesures de vitesse de l’A330, et désorienté les pilotes jusqu’au décrochage de l’appareil. Après une première enquête, les juges d’instruction avaient alors prononcé un non-lieu le 29 août 2019. Scandalisés, les proches des victimes et les syndicats de pilotes avaient fait appel ; la Cour de cassation avait en aout 2021 renvoyé Air France et Airbus en correctionnelle (comme le demandaient le parquet général et les familles de victimes), suite à l’annulation trois mois plus tôt du non-lieu qui avait suivi le précédent procès.
Darius a commenté :
9 décembre 2022 - 13 h 27 min
Bien évidemment que le Parquet est corrompu dans cet affaire !
Shôgun a commenté :
12 décembre 2022 - 11 h 09 min
Le mot « corrompu » est une accusation de délit pénal qui, comme toute accusation, doit être démontrée. Pouvez-vous démontrer votre accusation ?
Je me contenterai pour ma part de constater que le Parquet n’est pas neutre dans cette affaire. Affirmer a priori qu’une culpabilité des parties impliquées est « impossible à démontrer » alors que l’enquête montre pour le moins de sérieux dysfonctionnements, pour ne pas dire de sérieux manquements de certains acteurs en charge de la sécurité des voyageurs, c’est afficher un parti pris pour le moins subjectif.
Ceci étant, l’avis du Parquet n’engage que le Parquet.
Nous verrons ce que décide le tribunal.
fayçalair a commenté :
9 décembre 2022 - 15 h 55 min
et le fabricant des sondes pitot???????
228 morts et…. a commenté :
10 décembre 2022 - 10 h 06 min
…vous allez voir que tout ça finira par aucun coupable et même aucun responsable: autant avoir le courage de dire dans les yeux des familles des victimes que…c’était juste la faute à pas de chance que de se retrouver dans le mauvais avion au mauvais moment !
Possiblement honteux tout ça !
Dakota a commenté :
10 décembre 2022 - 10 h 39 min
Les “réactions” complotistes, sans aucune réflexion, ne présentant aucun intérêt. Tous les modèles de sondes peuvent se trouver bloqués, pendant quelques dizaines de secondes, par des cristaux de glace. D’autres appareils avaient connu le même incident : seul l’appareil de l’AF447 est tombé. Aux commandes, au moment de l’incident, le moins expérimenté des trois pilotes parce que les deux autres, de leur propre aveu, manquaient de sommeil. Et ce PF crispe sa main droite sur son mini-manche en donnant un ordre à cabrer à l’appareil qui, fonctionnant parfaitement bien, obéit immédiatement et pleinement à cet ordre aberrant. Et aucun des trois pilotes n’est en mesure de prendre conscience que l’un d’eux a fait sortir l’appareil de son domaine de vol. Et il serait scandaleux de dire que c’est les pilotes qui ont fait “tomber” l’appareil ?
Ben voyons a commenté :
10 décembre 2022 - 16 h 29 min
Désolé pour les tenants des thèses complotistes contre notre justice , qui ici fait son travail, ce qui devient rare.
Pour mémoire, d’autres avions sont passés ce jour là sur l’atlantique et ont – souvent – contourné la perturbation qui s’y trouvait.
Seul un équipage a choisi de foncer dessus , et cet équipage était le seul dont le commandant de bord dormait après un week-end très fatigant à Rio ! – litote – (une excellente émission, basées sur les données réelles du vol et sur les enregistrements de voix a démontré tout cela (et n’a pas été attaquée pour diffamation !)
@ben voyons et son commentaire de béotien . a commenté :
11 décembre 2022 - 9 h 52 min
Ben voyons…
Qu’un avion , passé 30 minutes avant, ait évité une zone de perturbation n’implique absolument pas que le suivant doive suivre la même trajectoire et éviter de la même façon . Un cumulonimbus peut se déplacer, se former ou disparaître dans le même laps de temps. La situation météo évolue rapidement dans cette zone , les trajectoires d’évitement font de même .
Personne n’est en mesure de connaitre l’image radar dont l’équipage disposait pour réaliser un évitement météo , personne ne peut donc affirmer aussi stupidement que vous le faites que l’équipage a “foncé dedans ” surtout que les cristaux de glace ne génèrent aucun écho radar…
Shôgun a commenté :
12 décembre 2022 - 11 h 25 min
L’équipage a foncé délibérément dans le cumulonimbus, c’est un fait.
Nier ce fait en prenant un ton méprisant envers vos contradicteurs ne changer pas la réalité.
Plus grave, le commandant de bord manquait de sommeil de sa propre responsabilité avant d’entamer ce vol. Il est parti faire la sieste alors même que l’avion s’engageait dans un violent orage, laissant le pilote le moins expérimenté aux commandes… Il est réapparu dans le cockpit alors que l’avion avait déjà décroché et semblait manifestement ne pas être en état d’analyser correctement la situation…
De son côté, le pilote aux commandes a maintenu l’avion en position “cabrer” pendant quasiment toute la phase de perte d’altitude, persuadé d’être en survitesse alors qu’en dehors d’une indication erronée de la vitesse, tous les paramètres indiquaient un décrochage.
Le plus grave de tout: un grave défaut de coordination entre les pilotes. Ni le copilote en fonction, ni le commandant de bord n’ont compris à temps ce qu’était en train de faire le pilote aux commandes.
Si certains veulent trouver tout ceci normal, le fait est que cet avion s’est abimé en mer. Et qu’un avion de ligne s’abime en mer dans de telles circonstances est tout sauf normal.