Alors que des paroles apaisantes avaient été prononcées après un premier jugement à Londres dans l’affaire de la « peinture des A350 », un communiqué de la compagnie aérienne Qatar Airways explique qu’elle ira jusqu’au procès pour faire respecter ses droits.
Jeudi dernier, le dirigeant de Qatar Airways Akbar al-Baker déclarait : « chaque partenariat connaît des différends et j’espère simplement que ce différend puisse être résolu hors des tribunaux ». Changement de ton le 31 mai 2022 : dans un communiqué détaillant le plus récent verdict, la compagnie nationale qatarie basée à l’aéroport de Doha-Hamad International explique qu’elle est « prête à mener cette affaire jusqu’au procès pour s’assurer que ses droits sont protégés et qu’Airbus est tenu de remédier à un défaut sans précédent et extrêmement unique et préoccupant affectant le type d’avion A350, dans l’industrie et sur plusieurs transporteurs ». Depuis le début de son litige avec Airbus concernant les défauts de surface apparus sur ses A350-900 et A350-1000, 23 des 53 exemplaires livrés ont été cloués au sol sur ordre du régulateur qatari.
Qatar Airways a été déboutée la semaine dernière dans ses demandes de procédure, notamment sur la commande de 50 A321neo (dont dix en version LR) attendus à partir de février 2023 annulée par Airbus, ou celle visant à empêcher Airbus de livrer à d’autres les A350 neufs dont elle a refusé la livraison (trois A350-1000 ont été retirés à fin avril d’un carnet de commandes qui en compte encore 20).
Le juge David Waksman lui a en revanche accordé un procès à l’été 2023, qui pourrait durer 3 mois – sans se prononcer sur le fond, à savoir s’il s’agit d’un problème de sécurité comme l’affirme l’opérateur, ou d’un problème « cosmétique » comme l’affirment le constructeur (et l’EASA). Airbus a de son côté déclaré que « l’affaire peut maintenant avancer rapidement pour se concentrer sur le sujet principal, à savoir les fausses déclarations de Qatar Airways sur la sécurité et la navigabilité de l’A350 », assurant « privilégier une solution à l’amiable ».
Rappelons qu’en avril dernier, Qatar Airways avait fait monter la tension en assurant que les défauts de surface au cœur de l’affaire entraineraient un risque d’incendie. Elle avait déjà demandé 618 millions de dollars de dommages et intérêts pour l’immobilisation au sol des 23 A350 affectés par le problème, plus 4 millions par jour d’immobilisation supplémentaire ; le total réclamé dépasserait désormais le milliard de dollars. Fin février, Qatar Airways était également allé devant le tribunal pour demander le rétablissement de la commande des 50 A321neo (dont dix en version LR) attendus à partir de février 2023, une commande annulée par Airbus fin janvier (mais gelée mi-février).
Par crainte de manquer de capacité en particulier pour la Coupe du Monde de football et l’accueil des visiteurs attendus, la compagnie de l’alliance Oneworld a remis en service treize A330, loué des gros-porteurs et ressorti des A380 pourtant tant décriés par son patron ces derniers mois.
The judgment handed down by the justice in a hearing in the High Court on 26 May has exposed for all in the aviation sector to see, the fiction of the Airbus narrative that the condition affecting the Airbus A350s is a simple “cosmetic” paint issue.https://t.co/ceMZpOopx7
— Qatar Airways (@qatarairways) May 31, 2022
Ci-dessous se trouve l’intégralité du communiqué de la compagnie de Qatar Airways sur le jugement de jeudi dernier :
« Bien que Qatar Airways n’ait généralement pas pour habitude de publier des communiqués de presse détaillés, compte tenu des informations et des déclarations inexactes qui continuent d’être publiées par Airbus et dans l’intérêt de nos clients et de l’industrie, nous le faisons désormais. Le jugement rendu par la justice, M. le juge Waksman lors d’une audience devant la Haute Cour jeudi (26 mai) a exposé à tous dans le secteur de l’aviation, la fiction du récit d’Airbus selon lequel l’état affectant les Airbus A350 est un simple problème de peinture “cosmétique”. Dans sa décision, fondée sur les preuves fournies par Airbus, le juge Waksman a énoncé ses conclusions selon lesquelles il n’y a « pas de solution simple au problème » et que la seule solution actuellement proposée, qui implique une réparation extensive et potentiellement répétée du fuselage de tous avion affecté, traite les symptômes de la condition, pas la condition elle-même ».
« Qatar Airways recevra pour la première fois une information complète sur les détails de l’état de dégradation accélérée de la surface des Airbus, avant le procès, cependant, pour le moment, l’évaluation indépendante de l’état par le juge Waksman est une étape importante. Sa décision explique : «En outre, il n’est pas suggéré que ces problèmes soient ponctuels, limités uniquement aux avions déjà livrés au Qatar ou à d’autres avions faisant l’objet de l’accord A350. En effet, l’argument positif d’Airbus lui-même, tel qu’il est plaidé dans sa défense, est que la Condition est effectivement susceptible de se produire à un moment donné de la durée de vie d’un A350 car elle résulte d’un coefficient de dilatation différent entre le polymère renforcé de fibres composites (CFRP ) dont la cellule est constituée, et la couche de feuille de cuivre expansé (ECF) qui y est collée ou durcie ».
« La raison de la présence de l’ECF est d’agir comme un paratonnerre qui empêche de graves dommages à l’avion en cas de coup de foudre direct qui se produirait, en moyenne, une fois par an pour les avions de passagers en service régulier. Ce que cette différence de coefficient de dilatation signifie, c’est que ces deux ensembles de matériaux se dilatent et se contractent à des rythmes différents et au moins sous la forme présente sur l’A350, entraînent au fil du temps (au moins) la fissuration des couches de peinture au-dessus ».
« La position actuelle d’Airbus est qu’en ce qui concerne les A350 déjà livrés à Qatar Airways et peut-être les futurs A350 dont l’assemblage n’est pas encore terminé, il n’y a pas de solution simple au problème. La seule chose qui peut être faite est d’appliquer des correctifs sur toutes les zones touchées (principalement le fuselage) qui pourraient être jusqu’à 900. C’est le chiffre cité par Airbus pour l’avion où des travaux de peinture ont été effectués à l’aéroport de Shannon ».
« Les correctifs pour d’autres aéronefs ne sont peut-être pas aussi étendus, mais à tout point de vue, ils semblent considérables. Le mot « patch » est approprié ici. Il traite des symptômes de la condition, pas de la condition elle-même. La condition elle-même ne peut pas être rectifiée, par exemple, en appliquant un revêtement supplémentaire, avec ou sans la peinture enlevée. Cela ne peut pas non plus être réalisé en retirant l’ECF (ce qui est de toute façon très difficile puisqu’il est durci sur le CFRP) et en appliquant un ECF de remplacement. En tout état de cause, à moins que le nouvel ECF ne diffère dans sa composition ou sa conception de son prédécesseur, la Condition serait susceptible de réapparaître, avec le temps. La même chose semble être la position s’il y avait une simple repeinture de l’avion ».
« Il s’ensuit logiquement que la condition résulte de la conception de l’aéronef en ce qui concerne les matériaux pertinents. Il n’y a que deux possibilités. Soit l’utilisation de cette forme relativement nouvelle de cellule en CFRP (au lieu d’un métal comme l’aluminium), combinée à tout type d’ECF, causera inévitablement la condition ou quelque chose de similaire. Ou il est en fait possible de concevoir et de fabriquer les matériaux pertinents, en restant fidèle à l’utilisation du CFRP, mais d’une manière qui évite la condition survenant en premier lieu. La première possibilité semble peu probable. C’est au moins parce que le Boeing 787 Dreamliner est également fabriqué en CFRP et pourtant, ces avions (qui sont entrés en service pour la première fois en 2011) ne semblent pas avoir présenté la condition. C’était un point soulevé dans les communications de Qatar Airways. Pour sa part, Airbus n’a apporté aucune preuve suggérant que le 787 avait manifesté la condition ».
Un porte-parole de Qatar Airways a déclaré mardi : « Nous soutenons depuis longtemps que ce problème ne se limite pas à la peinture et que les solutions proposées par Airbus ne traitent pas les problèmes fondamentaux affectant l’A350. Nous sommes très heureux que ce point de vue ait maintenant été compris et accepté par le tribunal. Airbus continue de soutenir que le problème n’est pas un problème de sécurité, cependant, Qatar Airways est d’avis que l’impact de l’état sur la sécurité de l’avion concerné ne peut être établi qu’une fois que l’état a été correctement étudié et que la cause profonde complète a été établie de façon concluante ».
« Airbus continue de se référer à l’état comme un état de peinture, malgré les dommages survenus au fuselage sous-jacent, et ils soutiennent que cela résulte du fait que le fuselage de l’A350 est de construction composite, cependant, Qatar Airways exploite de nombreux autres avions qui intègrent des matériaux composites éléments et à ce jour n’ont aucune preuve d’une telle condition. Qatar Airways n’a trouvé aucun autre fabricant qui pense qu’une telle condition est une condition acceptable associée à la construction composite ».
« En ce qui concerne l’annulation du contrat A321, Qatar Airways est extrêmement préoccupée par le précédent qu’Airbus crée sur le marché en résiliant à tort une commande d’avion client de lancement, car ils ne souhaitent plus respecter les conditions auxquelles ils se sont engagés et sont légalement tenus de le faire. , ayant librement conclu de tels arrangements ».
« Qatar Airways reste dans son droit contractuel de refuser la livraison d’autres A350 alors que le type d’avion souffre d’un défaut de conception qui a maintenant été reconnu par le tribunal, et qu’Airbus abuse de sa force sur le marché pour résilier un contrat distinct et sans rapport pour un autre type d’avion est extrêmement dommageable pour notre industrie. Qatar Airways est prête à mener cette affaire jusqu’au procès pour s’assurer que ses droits sont protégés et qu’Airbus est tenu de remédier à un défaut sans précédent et extrêmement unique et préoccupant affectant le type d’avion A350, dans l’industrie et sur plusieurs transporteurs ». « Qatar Airways se félicite du jugement de la Haute Cour et attend avec impatience le procès complet et accéléré. La divulgation anticipée requise d’Airbus nous donnera un aperçu de la véritable nature de la dégradation de la surface affectant les A350. Notre approche de cette question reflète notre engagement envers la mission collective de Qatar Airways d’atteindre “l’excellence dans tout ce que nous faisons”, en particulier en ce qui concerne la sécurité de nos passagers et de notre équipage ».
Filoustyle a commenté :
1 juin 2022 - 9 h 32 min
Bon le boulanger va jusqu’au clash
Pourtant Airbus lui proposait une solution qu’il refuse donc…..
Il en tirera toutes les conséquences le bédouin de son jusqu’au-boutismes.
Au delà de la technique le problème A350 n’est-il pas surtout un problème d’égo et de face perdu ??
gg de l'air a commenté :
1 juin 2022 - 14 h 00 min
L’utilisation du mot “bédouin” avec connotation péjorative doit être critiquée. On peut penser ce que l’on veut du PDG de Qatar mais le respect est obligatoire pour avoir un discours crédible.
filoustyle a commenté :
1 juin 2022 - 22 h 05 min
@gg de l’air
Avant de poster des propos polémistes il faudrait cher monsieur connaitre le mot “bédouin” ” (agriculteur nomade) et connaitre ce que cela signifie et que malheureusement vous trouvé péjoratif et je ne vois pas en quoi ?
Pourtant c’est comme cela qu’il se revendique avec fierté ce monsieur Baker et c’est ce qu’il est !
La grande majorité du peuple Qatari qui avant de découvrir du gaz étaient effectivement tous des bédouins ce qui est pour eux et ils ont raison est une grande fierté.
D’ailleurs ce monsieur Baker a une écurie de dromadaire de course et il en fait même l’élevage (comme un vrai bédouin).
Alors cher monsieur en voyant le mal partout surtout dans les mots que vous ne comprenez pas abstenez vous de polémiquer.
CHECKLIST a commenté :
2 juin 2022 - 8 h 55 min
Vous allez nous faire pleurer avec vos jérémiades envers un gars qui est avant tout un escroc et qui voulait faire financer ses déficits par Airbus…
Vous me faites penser à Tilo qui à part traiter ses contradicteurs de racistes n a rien à dire sur ce dossier espérant surtout un revers pour le constructeur Européen tant son idole Boeing est dans les choux pour les prochaines décennies
Airbus a proposé aux autres compagnies des solutions pour régler les soucis de peinture du 350 expliquez nous pourquoi le bédouin suffisant les a refusé ? Il a préféré jeter le bébé avec l eau du bain maintenant qu il assume …
L irrespect ou le racisme n ont rien à voir là dedans ; je n ai pas plus de respect pour A B que je n en ai pour O Leary autre escroc notoire de l aérien et adepte du chantage qui s est fait envoyé dans les cordes par Airbus lors de son dernier contact avec le constructeur et qui le méritait aussi grandement
L arrogance n est pas de mise quand on veut être crédible
Nom a commenté :
2 juin 2022 - 11 h 07 min
Je suis le président d’Airbus, je ne lui vendrai plus d’Airbus à cette crapule de guignol !!
EnGreve a commenté :
1 juin 2022 - 10 h 50 min
C’est d’un ridicule, c’est dommage, pourtant une belle compagnie, pas grave, je vais comme mon précédent voyage prendre Emirates à la place.
Francois a commenté :
1 juin 2022 - 11 h 03 min
Point d’histoire d’égo… QA a utilisé ce subterfuge pour éviter de sortir du cash en plein Covid. C’était juste un moyen de reporter leurs livraisons d’avions (et donc de les payer…) dans une période à faible demande.
QATAR A350 a commenté :
1 juin 2022 - 11 h 30 min
Akbar al-Baker a probablement lu les commentaires “victorieux” Airbus ; il a perdu la face et passe pour un menteur, sur la question sécurité. Cela doit expliquer son revirement et aussi la publication sur la page de Qatar Airways de son point vue.
Ce point vue est d’ailleurs incomplet et il effleure le problème des A321neo dont il se garde bien de dire que Airbus a été dans son bon droit d’annuler la commande.
N’oublions pas que QATAR a annulé 3 A350 pour faire pression, c’est le jeu donc pourquoi Airbus n’aurait pas le droit d’utiliser la même méthode que ce monsieur ? Beaucoup de mauvaise fois !
De plus selon Reuters, Airbus aurait bel et bien acquis aussi le droit de revendre les A350 refusés par Qatar.
Il avait dit qu’il commanderait du MAX : qu’est-ce qu’il attend ?
De plus, il va devoir patienter jusque 2023 (voir plus si il y a appel) donc grosse perte de temps, à moins que les deux parties finissent par s’entendre avant. (ce que je crois).
Read a commenté :
2 juin 2022 - 11 h 20 min
Airbus doit revendre aux autres compagnies les avions pour Q.A.Les responsables d’Airbus doivent lui donner une leçon à cet individu !!
Anna Stazzi a commenté :
1 juin 2022 - 12 h 29 min
Formidable !
QR figurait déjà au programme de formation de staff des banques de placement pour sa gestion aussi mauvaise que fantasque,
Désormais, les avocats rejoignent le club..
De l’argent, beaucoup d’argent à gagner par « ruissellement » comme on dit aujourd’hui.
Mesdames, Messieurs les juristes qui souhaitez changer de voiture tous les six mois, c’est le moment de postuler.
L’affaire démarrera sérieusement cet automne; de quoi prévoir quelques congés en allant faire des constats sur place durant l’hiver. Un avantage, on est bien assis.
inukshuk a commenté :
1 juin 2022 - 14 h 47 min
+1000.
Le monde des avocats va se les faire en platine!
Mais? a commenté :
1 juin 2022 - 17 h 13 min
Quid des avocatEs?
DN a commenté :
1 juin 2022 - 12 h 56 min
“Le juge David Waksman lui a en revanche accordé un procès à l’été 2023”
Monsieur Waksman ne semble pas avoir pris en compte l’extrème urgence de cette dangereuse faille de sécurité aérienne tant décriée par notre ami Akbar…
Bencello a commenté :
1 juin 2022 - 13 h 54 min
N’y a-t-il personne au sein du CA de Qatar Airways pour expliquer à Mr Al-Baker que le risque est grand quand deux arbitrages sont en sa défaveur, d’aller jusqu’au procès.
Il a déjà perdu les A321neo, les A350 déjà produits, proches d’être revendus, et va se permettre de se brouiller ( définitvement ?) avec le constructeur aéronautique numéro un, alors que Boeing se traine pour fournir des appareils certifiés.
Si,il y en a probablement... a commenté :
2 juin 2022 - 10 h 06 min
Tout comme il y en a probablement aussi dans l’entourage de Poutine, avec la même liberté d’expression,la même probabilité d’être écouté et entendu,… et la même crainte pour leurs avenirs auprès de leurs maîtres respectifs
.. Les mêmes manières de faire engendrant les mêmes attitudes dans les entourages…
colibris a commenté :
2 juin 2022 - 9 h 12 min
Mr Baker serait’il comme Martin sur un siège éjectable double 0 ???
Faut l’espérer pour sa compagnie.
97 % frais justice d'Airbus DOIVENT ETRE PAYES PAR QATAR ! a commenté :
3 juin 2022 - 13 h 07 min
On apprend que 97 % des frais de justice d’Airbus DOIVENT ETRE PAYES PAR QATAR !
On comprend mieux la gesticulation de Mr Akbar Al Baker…qui demandait une indemnisation mais qui se retrouve à devoir débourser…
Ce qu’il se garde bien de dire sur la page publiée sur le site QATAR.
Mr le PDG a raison sur un point, mieux vaut s’arranger à l’amiable : cela lui coûtera moins cher !
L’Emir du Qatar était l’invité du Président Macron il y a quelques jours, je me demande si ce litige a été évoqué et surtout la position du PDG de Qatar Airways…
Déclaration d’Airbus :
“À titre de simple baromètre de ce qui s’est réellement passé, la Haute Cour britannique a condamné Qatar à payer 97 % des frais de justice d’Airbus. Le rejet par le juge de toutes les demandes d’injonctions de Qatar confirme la position d’Airbus : la proposition de calendrier de Qatar aurait en fait ralenti le procès en distrayant et en détournant les ressources au lieu de l’accélérer”.
Source :
https://actu.fr/occitanie/toulouse_31555/a350-cloues-au-sol-le-bras-de-fer-entre-airbus-et-qatar-airways-se-poursuit-le-proces-inevitable_51395252.html