La supplique « à genoux » de l’IATA, exhortant les passagers ayant vu leur vol annulé durant la pandémie de Covid-19 d’opter pour un avoir plutôt que le remboursement en espèces du billet d’avion afin de protéger la trésorerie des compagnies aériennes, ne passe décidément pas. Les Entreprises du Voyage (EdV) ont à leur tour dénoncé le soutien du lobby industriel à ce « comportement délictueux ».
L’ex-SNAV n’y va pas par quatre chemins : dans un communiqué intitulé « la Camorra à genoux », le syndicat rappelle que l’Association du Transport Aérien International avait été qualifiée en d’autre temps par le parton de Qatar Airways « d’entreprise mafieuse » (il l’a dirigée en 2018), et trouve « un peu fort » la demande faite « à genoux » d’Alexandre de Juniac aux voyageurs et aux agences de voyages. En tenant ces propos, il « soutient le comportement délictueux de nombreuses compagnies et assume le risque de complicité de banqueroute dans le cas où un des membres de IATA ne serait pas en mesure d’honorer les avoirs émis », explique EdV.
Pour le syndicat représentant les voyagistes français, Alexandre de Juniac « n’ignore certainement pas que, contrairement à la charité, la solidarité qu’il invoque exige un minimum de réciprocité ». Et égrène les points de discorde :
• Les Entreprises du voyage sont solidaires des compagnies aériennes, maillons essentiels de notre écosystème mais le fait que les compagnies leurs transfère le coût de traitement des avoirs, estimé à 50 € par EMD (Electronic Miscellaneous Document, émis pour collecter des frais de services additionnels associés à un coupon de vol d’un billet électronique NDLR), est loin d’être une preuve de réciprocité dans la solidarité.
• Au cœur de la crise du Covid-19, au mépris de la solidarité la plus élémentaire, IATA ne s’est pas privée d’augmenter les garanties financières d’agences qui n’émettaient plus de billets.
• Lorsque, avant la crise du Covid-19, nous demandions avec insistance à IATA de mettre en place une garantie financière des compagnies (dans le seul cas du dépôt de bilan d’Aigle Azur, les billets émis non volés (BENU) représentaient plus de 40 millions d’€) réciproque à celle exigée des agences de voyages, Alexandre de Juniac nous répondait « circulez, y a rien à voir » avec une condescendance hautaine et rigide.
« La position à genoux, à laquelle IATA n’est pas habituée, en est d’autant plus inconfortable et source de courbatures. Elle peut faciliter l’introspection, premier pas vers le repentir », conclut EdV, dont le combat est parallèle à celui mené par les associations de consommateurs européennes (dont UFC-Que Choisir en France).
« IATA était un organisme normatif au départ. Au fil des ans, IATA est devenu un cartel dans le sens économique du terme, à savoir un oligopole où les quelques acteurs obtiennent le contrôle d’un marché par entente formelle. Les résolutions IATA pensées et voulues par une poignée de compagnies aériennes ont force de loi et s’imposent à tous aux dessus des lois nationales. L’Europe va t-elle réglementer le rapport économique de force dans le ciel du Vieux Continent au profit du consommateur et de la libre concurrence ? L’occasion est belle de le faire maintenant. Sera-t-elle saisie ?» ajoute un dirigeant du comparateur de tarifs aériens Bourse Des Vols.
Rappelons toutefois que selon les dernières prévisions de l’IATA, les compagnies européennes devraient enregistrer une perte nette de 21,5 milliards de dollars en 2020 (contre un bénéfice net de 6,5 milliards en 2019), ce qui pourrait menacer “6 à 7 millions d’emplois liés à l’aviation en Europe“. Alexandre de Juniac, reconnaissant que sa position est « difficile », rappelait lors de sa désormais fameuse supplique que sa priorité est de sauver les trésoreries de ses membres « dans un état complètement apocalyptique ». Même si l’activité de l’IATA est « plutôt de chouchouter les passagers et pas de leur poser des difficultés et problèmes, notamment des problèmes financiers ».
private equity a commenté :
23 juillet 2020 - 18 h 44 min
Encore une fois on se trompe de cible.
Ce sont les Etats qui ont empêchés les compagnies aériennes d’exercer leurs activités.
Ce sont les Etats qui doivent payer les dégâts et cela inclus les billets non utilisés
rv2lyon a commenté :
23 juillet 2020 - 20 h 57 min
Donc ce sont aux contribuables de rembourser les billets aux voyageurs et comme souvent dans un pays, celui qui voyage est celui qui paye des impôts, vous proposez à ceux qui voyagent de se rembourser eux mêmes…
Belle vision des choses, mais je ne suis pas franchement d’accord pour me rembourser.
flydreamer a commenté :
23 juillet 2020 - 23 h 42 min
@ PRIVATE EQUITY : C est se montrer très indulgent en dedouanant les compagnies et TO et en mettant tout sur le dos de l État.
La plupart des États ont adopté le principe de précaution, en particulier sur les liaisons aériennes et la fermeture des frontières.
Il est inadmissible que des passagers ne puissent pas avoir droit à un remboursement de ces compagnies qui ont encaisses l’argent parfois plusieurs mois avant la date des vols. Pour certains ( issus des COI) , ce sont de grosses sommes d’argent économisées pendant longtemps : Une famille avec 2 enfants, c’est 6000€ en Eco vers la métropole ( n’est ce pas AF ?)… Et si une vague de remboursement était échelonnée de manière raisonnable et proposée aux clients cela aurait pour mérite de calmer les esprits pour que personne n’y soit perdant.
Lorsque vous souhaitez modifier / annuler votre billet, la compagnie ne vous fait pas de cadeau et tout se paye. Alors pourquoi leur accorder cette circonstance favorable et accepter leurs doléances.
Si on suit votre suggestion et qu’on la pousse à l’extrême , et que l’on a opté pour une compagnie non européenne (y en a pas mal) allez exiger à un État étranger de payer à la place ( à l’instar d’aller supplier à genoux son banquier de ne pas pouvoir honorer le remboursement de ses dettes et de demander à l’État qui le fasse à notre place) .
Ici et jusqu’à preuve du contraire, nous sommes dans un litige et un contentieux client / prestation de service non respecte dans le cadre d’un droit au remboursement de vols annulés par des compagnies aériennes ; le COVID est prétexte à étouffer la requête. Arnaque ciblée ou pas ? Conclusion : on escroque toujours facilement les plus vulnérables et on s’en prend aux plus faibles.
FL350 a commenté :
24 juillet 2020 - 16 h 58 min
C.Q.F.D.
kyle a commenté :
23 juillet 2020 - 19 h 32 min
Les agences de voyage qui elles ont obtenu le droit de proposer des avoirs au lieu de remboursement.
Donc au final elles sont choquées que l’argent soit dans les caisses des compagnies et pas dans les leurs.
Puisqu’au final le client d’une agence de voyage n’aura pas son argent en cash.
Les agences peuvent attaquer Iata… elles veulent que Ryanair Wizz Air et Easyjet soient les seules survivantes ?? Très bien… mais ces compagnies ont tendance à ce passer des couteux intermédiaires qu’elles sont.
Pour les faillites… c’est le problème des compagnies et non pas de IATA de rembourser les clients ou bien…
Harry CANTONEY a commenté :
24 juillet 2020 - 12 h 00 min
KYLE : Pensez-vous que l’expression “proposer des avoirs” soit adéquate ? L’utilisation du verbe “IMPOSER” correspondrait mieux à la situation.
Les AGV justifient cette pratique en raison de leurs énormes difficultés de trésorerie. EDV pourraient-elles publier le montant des forfaits (acomptes et soldes) encaissés non remboursés et non servis pour cause de Covid, comparé au montant des sommes réellement payées et non restituées par les différents prestataires ?
Sans être devin, on peut imaginer que la découverte de ces 2 montants et les conclusions faciles à en tirer sur l’efficacité redoutable du lobbying de la profession, en feront verdir de honte les fonctionnaires de Bercy qui ont rédigé (dans la précipitation et presque aveuglément) cette ordonnance.
lacroix a commenté :
24 juillet 2020 - 10 h 43 min
Normal de se faire rembourser, lorsque un service que vous avez payés n’est pas effectué.
Agence, site internet, compagnies ou autre !
Tu fait pas ton boulot, pour un travail pour lequel je t’ai payé “et en plus l’avance” et qui entraine d’autres annulations et d’autres frais Pour moi.
Je m’en fout de ta trésorerie, comme tu t’en fout de la mienne !
Alors faites pas chier avec vos avoir …Remboursez Nous..un point c’est tout le Covid 19 il as bon dos pour nous enfler!
FL350 a commenté :
25 juillet 2020 - 12 h 36 min
Il revient à l’IATA de mettre en place une garantie financière, que les grosses compagnies ont toujours refusées sous le prétexte qu’elles n’étaient pas concernées par le moindre risque !
Une telle garantie réglerait le problème définitivement.