La Cour internationale de justice (CIJ) a jugé illégal le blocus aérien imposé au Qatar par quatre pays dont l’Arabie saoudite, laissant entrevoir pour sa compagnie nationale un retour à des routes plus directes et donc plus économiques. Les Airbus A380 de Qatar Airways semblent avoir complètement disparu des systèmes de réservation.
Les juges de la plus haute juridiction des Nations Unies ont sans surprise rejeté « à l’unanimité » une requête de l’Arabie saoudite, du Bahreïn, de l’Egypte et des Emirats arabes unis, qui estimaient que l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) n’était pas compétente juridiquement lors d’une décision favorable au Qatar prise en 2018. Les quatre pays avaient interdit en juin 2017 aux avions de Qatar Airways de traverser leur espace aérien ou se poser dans leurs aéroports, mais aussi fermé leurs frontières terrestres et maritimes avec l’Emirat voisin, officiellement au nom de la lutte contre le terrorisme.
Le ministre qatari des Transports Jassim Saif Ahmed al-Soulaiti a déclaré dans un communiqué : « nous nous félicitons de la décision prise aujourd’hui par la CIJ, qui verra les Etats imposant un blocus enfin traduits en justice pour avoir violé les règles de l’aviation internationale ». Il a ajouté : être « convaincu que l’OACI finira par admettre que ces actions sont illégales. Il s’agit de la dernière d’une série de décisions qui illustrent le mépris continu des pays du blocus pour le droit international et l’application de la loi ». La décision de la CIJ est « technique et se limite aux questions de procédure et à la compétence pour régler le différend. Elle n’a pas tenu compte du bien-fondé de l’affaire », a assuré de son côté le gouvernement des Emirats arabes Unis, un point de vue partagé par des responsables saoudiens.
Deux mois après le début du blocus, l’OACI avait annoncé avoir trouvé un accord avec les EAU et le Bahreïn pour faciliter les vols de la compagnie basée à l’aéroport de Doha-Hamad International. Le porte-parole de l’organisation onusienne Anthony Philbin précisait alors que « des routes aériennes existantes ont été rétablies », tandis que « de nouveaux couloirs aériens temporaires ou alternatifs » ont été mis en place. Les NOTAM précisaient que ces routes au-dessus des eaux internationales ne passaient pas au-dessus du territoire des voisins du Qatar. Mais l’OACI avait aussi dit en termes clairs que les Emirats Arabes Unis, le Bahreïn et l’Egypte avaient le devoir de suspendre l’interdiction de vol en tant que signataires de l’accord international de transit aérien (que l’Arabie Saoudite n’a pas signé) : l’interdiction de survol est illégale si elle ne vise que certains opérateurs.
Pour Qatar Airways, la fermeture des espaces aériens avaient entrainé des déviations importantes sur les routes habituelles (surtout vers l’Afrique et l’Amérique pour ceux de l’Arabie Saoudite et l’Egypte, et vers l’Asie pour celui des EAU), avec à la clé des temps de vol plus long et donc des consommations de carburant plus importantes. En ajoutant la perte de marchés clés pour ses passagers, le blocus avait été jugé responsable de la perte annuelle nette de 69,1 millions de dollars annoncée en septembre 2018.
La compagnie de l’alliance Oneworld a annoncé hier dans un communiqué qu’elle allait demander des compensations : « nous attendons avec intérêt d’observer le retour de l’État du Qatar à Montréal pour exhorter le Conseil de l’OACI à condamner le blocus illégal de l’espace aérien, et à prendre les mesures appropriées pour obliger les quatre États bloquants à se conformer à leurs obligations en vertu du droit international afin de rétablir la normalité de l’aviation civile internationale (…). Qatar Airways poursuivra son dossier en vue d’une réparation appropriée des préjudices financiers infligés à la suite de le blocus illégal de l’espace aérien ». Rien ne dit que les quatre pays en question obéiront.
En raison cette fois de la pandémie de Covid-19, Qatar Airways a déjà cloué au sol ses dix Airbus A380, configurés pour accueillir 8 passagers en première, 48 en classe Affaires et 461 en Economie. Jusque là, les GDS indiquaient un retour à partir de juin 2021 ; mais selon Airlineroute, les superjumbos ont désormais totalement disparu des listings d’OAG qui courent jusqu’à fin aout 2021.
Rappelons que les destinations habituelles des A380 de la compagnie qatarie sont Paris-CDG, Londres-Heathrow, Francfort, Sydney, Melbourne et Perth ; ils y sont aujourd’hui remplacés par des A350-900 et -1000, ainsi que par des Boeing 777-300ER.
Le patron de Qatar Airways Akbar Al Bake avait annoncé dès mai 2019 que les A380 commenceront à sortir de la flotte en 2024 ; ce serait désormais chose faite à l’horizon 2028, voire plus tôt si la demande ne justifie pas leur retour dans les airs.
Inukshuk a commenté :
16 juillet 2020 - 16 h 40 min
Tiens, Qatar fait appel à la Cour Internationale de Justice? Rassurez-vous, pas pour jeter un oeil sur les turpitudes de la “démocratie” sur son sol…
La CIJ est tout aussi crédible que la cour européenne qui vient d’officialiser l’évasion fiscale opérée par Apple et son complice la République d’Irlande.
Juriste a commenté :
16 juillet 2020 - 17 h 21 min
La CIJ ne juge pas le respect de la “démocratie” de X ou Y Etat encore moins l’évasion fiscale des GAFAM
FL350 a commenté :
16 juillet 2020 - 18 h 17 min
La CIJ est la plus ancienne instance juridique internationale, née avec l’ONU en 1945. Beaucoup d’affaires diplomatiques ont été soumises à la CIJ, avec parfois la résolution parallèle d’un conflit, ou résolution antérieure à la comparution, ce qui revient au même).
Ce n’est que depuis la création des instances spécifiques, plus récentes (TIDM, 1982, TPIY, 1993, TPIR, 1994, et surtout CPI ,2002) que la CIJ a vu ses compétences réduites.
Par ailleurs, on se moque royalement d’un conflit entre ces grandes démocraties que sont le Qatar, l’Arabie Saoudite, le Bahreïn, l’Egypte et les Emirats Arabes Unis : c’est leur problème, qu’ils se débrouillent entre eux.
private equity a commenté :
16 juillet 2020 - 21 h 14 min
Le Qatar a le même problème que ces voisins. Il cherche a dissocier dans l’esprit des consommateurs du monde entier, la marque , par ex Qatar Airways du pays le Qatar. Dans ce cas le lien est évident. Mais le grand publique ne fait pas le lien entre les émirats arabes unis et DNATA la société d’assistance au sol par exemple qui cherche prendre des parts de marché à SWISSPORT autre société d’assistance au sol. C’est de la communication , on cherche a obtenir un label, une convention collective, tout ce qui peut faire “joli”.
depuis 1990 les passagers ne sont plus “patriotes”, c’est un fait, de nombreux pays dont la très riche suisse ont abandonné l’idée d’avoir une “compagnie nationale”. Je ne compte plus les commentaires de mon entourage qui trouvent que “Qatar c’est tellement mieux et souvent moins chère”.
Les compagnies aériennes deviennent des marques mondiales comme Toblerone ou kinder surprise.
Le passager lambda qui a découvert lors de la crise covid que leur pays était incapable de produire des masques, des blouses ou du gel hydroalcoolique, des respirateurs…
Ah tiens ça fait 30 ans qu’on délocalise tout!!!
Mais on se donne bonne conscience, c’est promis pour la salade on l’achètera au paysan du coin, même si elle est plus chère.
Et puis tous ces dictateurs achètent à tour de bras des AIRBUS et des BOEING (à 50/50 pour ne fâcher personne) c’est le business quoi, mon petit voyage en Asie par année ne va pas changer la donne. Tiens je vais commander ma valise pour mon prochain voyage sur Amazon, le livre pour la plage et le guide touristique…
daisy a commenté :
17 juillet 2020 - 7 h 19 min
au nom de quoi la CIJ déclare t elle illégal le blocus, au nom de quel intérêt suprême
Voyageur a commenté :
17 juillet 2020 - 15 h 14 min
T’inquiète ma grande, c’est politique.