Le SCARA a déposé un recours au Conseil d’État contre le décret prévoyant que désormais le ministre chargé des transports décidera seul de faire bénéficier un aéroport du régime de la « double caisse », dont l’adoption serait contraire au droit européen.
Le Syndicat des Compagnies AéRiennes Autonomes (SCARA), qui regroupe 47% des compagnies aériennes françaises, basées en métropole et dans les territoires ultra-marins ainsi que des sociétés d’assistance aéroportuaire et de formation, a annoncé le 17 décembre 2019 son recours devant le Conseil d’Etat. Dans son viseur, le décret du 3 octobre 2019 qui prévoit que désormais le ministre chargé des transports « décidera seul, sans aucune consultation préalable, de faire bénéficier un aéroport du régime de la double caisse », alors qu’auparavant, le passage d’un aéroport de la « caisse unique » à la « double caisse » devait être avalisé par l’autorité de supervision indépendante.
Pour le SCARA ce décret (n° 2019-1016) a été « adopté selon une procédure irrégulière et est contraire au droit européen » : le syndicat explique dans son communiqué que tous les pays de l’Union européenne ont l’obligation de confier la supervision des redevances facturées aux compagnies aériennes par les exploitants des aéroports dont le trafic est supérieur à 5 millions de passagers par an « à une autorité indépendante, tant des compagnies aériennes que des sociétés aéroportuaires » (directive n°2009/12/CE du 11 mars 2009). Le SCARA considère que le décret du 3 octobre 2019 est contraire à cette directive, la Commission européenne ayant précisé que : « tout changement de système pour passer de la caisse unique à la caisse double ou vice versa représente une modification fondamentale du système des redevances, dans la mesure où il pourrait avoir une incidence notable sur le niveau des redevances appliqué. Un tel changement devrait s’accompagner d’une consultation avec possibilité de recours à l’autorité de supervision indépendante, conformément aux dispositions pertinentes de la directive ».
Le SCARA demande par conséquent au Conseil d’État d’annuler le décret du 3 octobre et « d’enjoindre au Gouvernement de prendre un nouveau texte dans un délai de six mois, afin de mettre le cadre français de régulation aéroportuaire en conformité avec le droit européen ». Le décret attaqué complète l’ordonnance du 24 juillet 2019 qui a chargé l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER), renommée Autorité de régulation des transports (ART), de superviser les redevances facturées aux compagnies aériennes par les exploitants des grands aéroports. Le SCARA constate que le Gouvernement « a profité du transfert des compétences de régulation aéroportuaire d’une autorité à l’autre, pour réduire les pouvoirs de l’ART », alors que l’ART présente selon lui « toutes les garanties d’indépendance requises, comme le montre sa première décision prise, le 7 novembre 2019, refusant d’homologuer les tarifs présentés l’aéroport de Nice ».
Lors d’un précédent contentieux mené par le SCARA, le Conseil d’État avait jugé en avril 2015 que la direction générale de l’aviation civile (DGAC), placée sous l’autorité du ministre chargé des transports, ne peut pas exercer cette mission de supervision indépendante puisque « l’État participe au capital social d’une compagnie aérienne et de plusieurs sociétés gestionnaires d’aéroports, et (…) est en outre propriétaire de plusieurs aéroports importants ». A la suite de cet arrêt du Conseil d’État, le Gouvernement avait d’abord créé une Autorité de supervision indépendante (ASI), par un décret du 23 juin 2016, avant de décider, moins de trois ans après, de transférer la régulation des aéroports à l’ARAFER/ART.
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