Boeing a émis hier un bulletin rappelant aux compagnies aériennes les mesures à adopter par les pilotes en cas d’informations erronées des capteurs d’incidence, après l’accident d’un 737 MAX 8 de la low cost Lion Air en Indonésie qui a coûté la vie aux 189 passagers et membres d’équipage.
L’avionneur américain a précisé le 7 novembre 2018, dix jours après le crash du vol JT610, que le bureau d’enquête indonésien KNKT avait indiqué des erreurs dans les informations fournies par les capteurs d’incidence (AOA, Angle of Attack). Un bulletin opérationnel a été envoyé à tous les opérateurs, rappelant « les procédures existantes pour les équipages pour gérer les cas dans lesquels l’information d’un capteur AOA est erronée ». Boeing ne précise pas si ce bulletin concerne uniquement les 737 MAX, et continue à coopérer avec les enquêteurs et à leur fournir une assistance technique « quand nécessaire », son communiqué n’ajoutant aucun commentaire. Nul ne sait si le problème, apparemment découvert lors de l’analyse de l’enregistreur de données du vol (FDR), concerne les deux sondes ou l’avionique. La FAA américaine a émis dans la foulée une directive concernant les 246 Boeing 737 MAX en service, demandant aux opérateurs de mettre à jour le manuel de vol (AFM) d’ici trois jours pour fournir à l’équipage « les procédures de compensation du stabilisateur horizontal à suivre dans certaines conditions ».
La mesure de vitesse était jusque là soupçonnée, des erreurs ayant été enregistrées sur quatre vols du 737 MAX 8 immatriculé PK-LQP y compris lors du vol fatal du 29 octobre 2018 entre Jakarta-Soekarno Hatta et l’aéroport de Pangkal Pinang. Le bulletin, un « processus ordinaire » selon Boeing, modifie la cible de la suspicion, mais laisse toujours entendre que les réactions des pilotes seraient en cause dans l’accident. Un problème de capteur d’incidence pourrait en effet conduire l’ordinateur de bord à indiquer un mauvais angle d’attaque et entrainer un décrochage et un piqué soudain.
Il est de toute façon trop tôt pour expliquer l’accident du vol JT610, seul l’enregistreur des conversations du cockpit (CVR) pouvant apporter un éclairage sur ce que les pilotes ont vécu et comment ils ont réagi. La deuxième boîte noire n’avait toujours pas été retrouvée ce jeudi matin dans la mer où le monocouloir s’est écrasé 13 minutes après son décollage – après que l’équipage a demandé à faire demi-tour. Un navire « suceur de boue » devrait être déployé dans la zone de recherche pour faciliter la localisation du CVR.
Le ministère des Transports indonésien a lancé un audit de Lion Air, portant entre autres sur les procédures d’exploitation ou la qualification des pilotes, ainsi que des contrôles inopinés chez d’autres transporteurs du pays. Les avions de la low cost ainsi que de Garuda Indonesia, Batik Air, Sriwijaya Air, AirAsia Indonesia, Wings Air et NAM Air font l’objet de visites de contrôle ; « six types d’appareils, Boeing 737-300 et -500, -800 et -900ER, 737 MAX 8, ATR 72-500/600 et Airbus A320-200 ont été inspectés. Jusqu’à présent, tous les résultats sont bons et tous en état de navigabilité », a déclaré dans un communiqué Avirianto, directeur de la navigabilité et des opérations des aéronefs. En attendant le résultat de l’audit, Lion Air a suspendu les négociations avec Boeing sur la commande de cinquante 737 MAX 10 officialisée en avril dernier, qui faisait de la low cost la compagnie de lancement des trois types de 737 MAX.
Plus d’un millier de personnes restent impliquées dans les recherches, dont une centaine de plongeurs – qui ont perdu l’un des leurs vendredi dernier, l’homme de 48 ans ayant été retrouvé inconscient et n’ayant pu être ranimé. Au total 186 sacs contenant des restes humains ont été récupérés, mais seulement 44 passagers ont été formellement identifiés selon le chef de l’agence de recherche Basarnas, Muhammad Syaugi.
Si le crash de la semaine dernière n’est « que » le deuxième mortel dans l’histoire de Lion Air (25 personnes avaient péri en 2004 quand son McDonnell Douglas MD-82 s’était écrasé à Surakarta), la low cost a connu plusieurs accidents sérieux, dont celui de 2013 à Bali qui n’avait fait aucune victime alors qu’un 737-800 s’était posé en mer lors d’un atterrissage raté. Lion Air figurait alors sur la liste noire des compagnies aériennes interdites de vol en Europe, mais en était sortie en juin 2016 – en même temps que sa filiale Batik Air et Citilink, la low cost de Garuda Indonesia. En juin dernier, la Commission européenne retirait tous les transporteurs aériens indonésiens de sa liste noire, « compte tenu des nouveaux progrès en matière de sécurité aérienne qui ont été constatés dans ce pays ». Au total, Lion Air a perdu cinq avions dans des incidents divers depuis 2002, cinq autres étant sérieusement endommagés.
L’accident du vol JT610 est le plus grave en Indonésie depuis 2015, quand un Airbus A320 de la low cost AirAsia Indonesia s’était écrasé en mer lors du vol QZ8501 entre Surabaya et Singapour. Le pire dans l’histoire du pays reste celui de Garuda Indonesia en septembre 1997, quand son A300 s’était écrasé sur une colline lors de son approche de l’aéroport de Medan (234 mort).
Malick a commenté :
8 novembre 2018 - 14 h 49 min
Que risque Boeing, en termes de vente de son 737 MAX, s’il s’avère que certains instruments de mesure de vitesse et d’angle d’attaque sont responsables du crash et que l’intervention faite par les techniciens après les premières anomalies détectées n’est pas en cause ? N’est-il prématuré pour l’avionneur que son joyau connaisse des déboires aussi dramatiques ? Qu’est ce Airbus, avec son A320 NEO, pourrait en tirer en termes de positionnement sur le marché des moyens courriers ? Voila autant de questions qui doivent hanter le sommeil des dirigeants de la société de SEATTLE.
Lion B737MAX a commenté :
8 novembre 2018 - 16 h 13 min
Il peut très bien s’agir d’une défaillance ponctuelle et unique, comme un défaut de fabrication propre à un avion et qui ne remet pas en cause l’ensemble d’une production.
Certains instruments et composants sont fournis par un ou des équipementiers et non fabriqués par Boeing ou Airbus.
Comme les sondes de vitesse sur A330 qui peuvent provenir de deux fournisseurs dont une marque défaillante sur certaines.
(crash Air France Rio : sonde Pitot impliquée).
Le constructeur dans ce cas voit avec le fournisseur et éventuellement peut l’incriminer et demande aux compagnies leur remplacement.
Pour le MAX, il est trop tôt de tirer des conclusions, comme on a pas encore établi la ou les causes exactes, il vaut mieux attendre les analyses de la boîte noire et que l’on retrouve aussi la seconde, pour idem.
Reste plus qu’à patienter et que l’on obtienne les causes.
Dans l’attente, Boeing a déjà fait des recommandations et demandes de vérifications.
Airbus & Boeing a commenté :
8 novembre 2018 - 20 h 24 min
Airbus et Boeing sont deux géants concurrents qui se respectent et ne sauraient tirer un quelconque profit sur le dos de pertes de vies humaines.
Hélas un crash peut arriver à n’importe quel constructeur. Cela ne sert personne.
Boeing & Airbus & d’autres gagnent leur marché grâce à la technique, à la qualité de leur produit, aux performances, la qualité de leurs services commerciaux, etc…
Boeing est suffisamment sous pression avec le gel de la commande de 50 MAX.
Pour le reste attendons les analyses complètes des boîtes, espérons qu’ils récupèrent au plus vite la 2ème.
Forza a commenté :
9 novembre 2018 - 14 h 30 min
Boeing risque autant qu’Airbus dans ce genre de situation.
Qui malheureusement arrive.
Dakota a commenté :
9 novembre 2018 - 10 h 39 min
Certes, les anémomètres (Pitot était un ingénieur français au XVIIIè siècle : ce n’est pas une marque), comme bien d’autres équipements, proviennent d’entreprises associées, mais le constructeur de l’appareil a la responsabilité du choix de l’entreprise et du modèle. Par ailleurs, n’en déplaise aux arrogants qui ricanent à ce sujet, j’attends toujours qu’on me démontre qu’un pilote va forcément au crash s’il ne dispose pas d’indications fiables sur la vitesse de déplacement de son appareil par rapport au sol (iAS douteuses).