Boeing a annoncé pour le 1er trimestre une perte nette de 641 millions de dollars, et confirmé d’ici la fin de l’année la suppression de jusqu’à 10% de ses effectifs – et 15% dans la branche avions commerciaux. Le ralentissement des rythmes de production a été confirmé mais le 737 MAX ne devrait désormais pas revoler avant le mois d’aout.

Au premier trimestre clos au 31 mars 2020, le constructeur américain a réalisé un chiffre d’affaires de 16,9 milliards de dollars, en baisse de 26%, avec une perte nette de 641 millions alors qu’il avait enregistré un bénéfice 2,350 milliards au T1 l’année dernière. Et la dette est passée en trois mois de 27,3 à 38,9 milliards de dollars. Ces résultats « reflètent essentiellement » les répercussions de la pandémie de Covid-1919 et de l’immobilisation du 737 MAX depuis mars 2019, souligne son communiqué. Boeing constate « un impact important » sur la demande de nouveaux avions commerciaux et des services : les compagnies aériennes retardent l’achat de nouveaux appareils, ralentissent les calendriers de livraison et diffèrent les interventions de maintenance facultative. Afin « d’adapter ses activités à la nouvelle réalité du marché », Boeing a pris plusieurs décisions, parmi lesquelles la réduction des cadences de production de ses avions commerciaux (qui vient de reprendre) ou une restructuration de son équipe dirigeante et de son organisation.

Mais le groupe a surtout confirmé qu’il prévoit de « réduire l’ensemble de ses effectifs dans le cadre d’un programme de départs volontaires et, si nécessaire, de mesures supplémentaires concernant la main d’œuvre ». D’ici la fin de l’année, cela devrait concerner environ 10% des effectifs dans le monde, et en particulier plus de 15% des emplois dans l’aviation civile, a précisé le CEO David Calhoun en marge de la présentation des résultats. Surtout dans l’Etat de Washington selon le Seattle Times, et cela représenterait 10.000 des quelque 65.000 postes dans la division Avions commerciaux. Un « haut pourcentage » des départs ou licenciements concernerait les « white collars » (et donc pas les employés de la production), a précisé le CEO. Qui espère que la plupart des départs se feront dans le cadre du plan de départs volontaires dévoilé au début du mois, une proposition déjà faite à quelque 70.000 employés, mais croit qu’en fin de compte « nous devrons faire quelque chose sur une base involontaire ».

La pandémie « affecte tous les aspects de notre activité, qu’il s’agisse des demandes émanant des compagnies aériennes, de la continuité de la production ou de la stabilité de la chaîne des fournisseurs », a déclaré David Calhoun. « Notre objectif premier est de préserver la santé et la sécurité de nos employés et des communautés où nous sommes implantés, en prenant des mesures difficiles mais indispensables pour traverser cette crise sanitaire sans précédent et nous adapter à un marché en profonde mutation ». Mais il reconnait que Boeing « va être une société plus petite pendant un certain temps », même si « nous restons confiants quant à notre avenir à long terme ».

A la fin du premier trimestre, le carnet de commandes total du groupe Boeing s’élevait à 439 milliards de dollars. Mais les réductions de cadence pour les avions commerciaux déjà évoquées ont été confirmées hier : pour le programme 787 Dreamliner, le rythme mensuel passera de 14 en début d’année à dix jusqu’en 2021, puis à sept en 2022. Pour le programme 777, la cadence descendra de cinq à trois avions par mois en 2021, tandis que la stabilité à 2,5 avions assemblés par mois sera de rigueur pour les 767 et 747. David Calhoun a d’autre part annoncé « en raison de l’environnement post-MAX » que le 777X, dont le deuxième exemplaire de 777-9 n’a pas pu effectuer son premier vol hier, aura une certification séparée et non dérivée du Triple Sept – avant d’être démenti quelques heures plus tard. Le premier vol du 777X s’est déroulé le 25 janvier dernier, et les premières livraisons sont toujours espérées pour 2021.

Côté Boeing 737 MAX, dont environ 800 exemplaires livrés ou assembles sont cloués au sol depuis mars 2019 et les deux accidents ayant fait 346 victimes chez lion Air puis Ethiopian Airlines, la production devrait reprendre à de « faibles taux » au moment de la remise en service toujours espérée cette année, pour grimper à 31 appareils par mois en 2021 (contre 52 début 2020). Le constructeur expliquait hier qu’il travaille toujours « en étroite collaboration avec la FAA sur le 737 MAX, concentré sur l’achèvement de la validation » du système anti-décrochage MCAS impliqué dans les deux crashes, et s’attend « actuellement » à ce que les approbations soient obtenues au troisième trimestre, ajoutant que le carnet de commandes MAX est resté « solide ». Le mois d’aout est le plus souvent cité officieusement quant à un retour dans les airs du monocouloir remotorisé, mais cette date pourrait être repoussée à l’automne. La FAA refuse toujours de fournir un calendrier sur la re-certification du logiciel.

La low cost Southwest Airlines, qui avait début 2019 reçu 34 des 280 MAX 8 commandés (elle attend également trente MAX 7), a annoncé mardi ne pas s’attendre à les faire revoler avant le 30 octobre. Le CEO Gary Kelly avait déjà expliqué qu’il faudra « environ 90 jours » entre le feu vert et la reprise des vols commerciaux. Et la low cost discute avec Boeing sur le report « d’environ la moitié » des livraisons prévues en 2020 et 2021, date à laquelle elle espérait en début d’année disposer de 123 MAX supplémentaires (dont 16 fournis par de sociétés de leasing). Selon la directrice financière de la low cost Tammy Romo, ces reports pourraient concerner « au moins 59 avions ».

« Nous progressons vers le retour en service du 737 MAX en toute sécurité, et nous mettons l’accent sur la sécurité, la qualité et l’excellence opérationnelle dans tout ce que nous entreprenons au quotidien », déclarait hier David Calhoun. « Le transport aérien a toujours fait preuve de résilience, notre portefeuille de produits et de technologies est solidement positionné, et nous sommes convaincus que nous sortirons de cette crise et prospérerons à nouveau en tant que leader de notre secteur industriel ».

Boeing: pertes, licenciements et le 737 MAX 1 Air Journal

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